Depuis Tableau de chasse (Rivages, 1998, repris en "Rivages poche"), Rafael Chirbes bâtit une œuvre largement traduite et récompensée dans son propre pays comme à l’étranger. Sur le rivage, le dernier roman en date du natif de la province de Valence, a été best-seller en Espagne et en Allemagne, où le Frankfurter Allgemeine Zeitung a salué "une magistrale anatomie de la chute".
Le rideau de cette ample et impressionnante fresque sociale et littéraire s’ouvre le 26 décembre 2010. Dans un pays en crise, dans une région où on n’embauche plus. Ce coin d’Espagne, l’immigré Ahmed s’y est établi et y gagne son pain comme il peut. Tour à tour, il a été maçon, menuisier, quand il ne travaille pas dans un restaurant de Misent, village inventé par l’auteur de La belle écriture (Rivages, 2000, repris en "Rivages poche") et de Crémation (Rivages, 2009, à paraître en janvier en "Rivages poche"), ou bien quand il file pêcher en douce dans l’étang. Un jour qu’il part lancer ses lignes, il tombe sur deux chiens qui s’écharpent pour… une main humaine.
Ahmed connaît Esteban. Ce Colombien tenait une entreprise de menuiserie. Son atelier est désormais fermé, les scellés ont été posés sur la porte. Esteban s’occupe de son vieux père dont l’agonie semble interminable. Plutôt que la pêche, il pratique quant à lui la chasse où il se rend souvent au volant de son 4×4 à soixante mille euros…
Sur le rivage impressionne par sa fluidité, sa manière d’entrecroiser les voix et les destins. Passant d’un protagoniste à l’autre avec son aisance habituelle, Rafael Chirbes sonde la vérité de la vie, le pouvoir de l’argent. Les combats et les défaites. Un monde qui s’effondre plus ou moins lentement à l’aube d’un XXIe siècle assez inquiétant. Al. F.