3 mars > Roman Etats-Unis

Salué par la critique, vendu à près d’un million d’exemplaires, traduit dans plus de vingt pays, Everything I never told you (Tout ce qu’on ne s’est jamais dit), le premier roman de l’Américaine d’origine hongkongaise, Celeste Ng, fut l’un des événements de l’année 2014 aux Etats-Unis. Si le succès n’a pas toujours raison, on ne peut dans ce cas précis lui donner tort. Glaçant d’effroi et de chagrin, ce roman est d’une redoutable efficacité narrative (en bon français : un "page-turner") en même temps qu’une ample réflexion sur les impasses et secrets du lien familial, la barrière des races, l’impossible transmission.

Tout commence par la fin du monde : la mort (accident ? suicide ? meurtre ?) de Lydia Lee, 16 ans. Son père est un professeur d’université d’origine chinoise qui ne s’est jamais tout à fait remis d’avoir franchi le plafond de verre ; sa mère, une femme au foyer qui reporte sur ses enfants ses espoirs d’émancipation. Un frère et une sœur complètent ce tableau de névroses familiales trop longtemps tues. La mort de Lydia, la recherche des causes de sa mort, la découverte des secrets des uns et des autres, va pulvériser la fausse quiétude du foyer.

Bien entendu, Tout ce qu’on ne s’est jamais dit est un roman noir (très noir, même), mais il l’est dans la mesure où le sont aussi les plus grands livres d’une Joyce Carol Oates ou d’une Laura Kasischke, qui servent de matrices à ce coup d’essai et de maître de Celeste Ng. C’est le rêve américain qui s’effiloche ici, dans les échos d’une violence sourde où règnent la folie et la mort. Etre le premier de sa lignée à devoir s’inscrire dans le jeu social est parfois un fardeau auquel on ne peut survivre. Celeste Ng a pour nous l’apprendre (et dans un style que l’on perçoit comme très issu des meilleurs ateliers de "creative writing") les mots et l’histoire les plus poignants. O. M.

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