Une maison de famille sur la côte bretonne. Antoine, 13 ans, garçon sage essentiellement passionné par le dessin (tiens, tiens !), s’apprête à y passer comme chaque année les deux mois d’été avec ses parents et son petit frère. Mais cette fois, un événement imprévu amène la jeune Hélène, 16 ans, fille d’amis des parents, à partager pendant une semaine la chambre des garçons. L’occasion pour Antoine de s’éveiller, entre le jardin, la plage et les rues du village, à des sensations nouvelles, à commencer naturellement par celles qui lui provoquent de vives réactions à l’entre-jambes.
Six ans après son magistral Polina (Casterman, 2011), et délaissant un temps ses multiples autres productions dont la série Lastman (avec Balak et Sanlaville, également chez Casterman) ou ses collaborations avec Ruppert et Mulot (La grande odalisque, Olympia, Dupuis 2012 et 2015), Bastien Vivès revient à sa veine la plus personnelle et au récit d’initiation intime, influencé par son expérience personnelle. Graphiquement, le jeune et prolifique auteur, né en 1984, approfondit son art du trait et des aplats associant le noir, le blanc et les bistres plus ou moins foncés mis au point pour Polina et développé ensuite dans Lastman comme dans la rafale de vrais faux guides (Le jeu vidéo, La famille, L’amour, La blogosphère, La guerre, La bande dessinée) qu’il a délivrée en 2012 dans la collection "Shampooing" de Delcourt. Sur le plan thématique en revanche, Une sœur renoue avec l’esprit de ses premières œuvres, Elle(s) (Casterman "KSTR", 2007), et surtout Le goût du chlore, qui lui a apporté la notoriété, Dans mes yeux ou encore Amitié étroite (Casterman "KSTR", 2008, 2009 et 2009), dans lesquelles il cherchait encore son style tout en démontrant l’étendue de son talent de dessinateur.
Bastien Vivès s’appuie sur une trame d’un classicisme désarmant - une jeune fille en fleurs qui s’abandonne à ses désirs et s’éveille à sa propre sexualité en initiant un garçon plus jeune que lui. Mais tout en faisant intervenir de multiples personnages (famille, amis, voisins), il parvient à faire ressortir par petites touches, par les positions de ses personnages, par leurs regards, par la simplicité de leurs conversations, la puissance, l’ambivalence et la douceur des sentiments. Fabrice Piault