“Elitistes, intimidantes, peu accessibles” : on reproche souvent aux bibliothèques publiques françaises de véhiculer une image de “temples sacrés du savoir”, qui serait l'une des principales causes de la désaffection des usagers. Les bibliothécaires doivent-ils dès lors chercher à faire perdre aux bibliothèques leur caractère sacré et opter résolument pour le concept de “3^e lieu”, espace convivial et accueillant, emblème de la modernité en matière de lecture publique aujourd'hui ? C'est ce que se sont demandés les participants à la table ronde organisée sur la question, qui a fait salle comble samedi après midi au salon du livre de Paris.

Le sociologue Claude Poissenot a répondu sans hésiter par l'affirmative : “Il faut envisager les bibliothèques comme autre chose que des lieux fondés sur la culture. C'est leur rôle d'espace collectif, rassemblant des personnes aux intérêts extrêmement variés qui est à valoriser”.

Pour Pierre Franqueville, programmiste, les professionnels doivent réfléchir à ce que la bibliothèque peut apporter à la cité, dans laquelle elle doit trouver une fonction structurante, et accompagner les pratiques des usagers, y compris celles qui relèvent du détournement.

Serge Bouffanges, directeur de la lecture publique de la ville de Bordeaux a donné l'exemple bordelais du Biblio.bato, un espace sur un ancien ferry animé trois fois par semaine par des bibliothécaires et ciblant le public des 15-35 ans.

L'ère des « méta-bibliothécaires »

Patrick Bazin, directeur de la Bibliothèque publique d'information du Centre Pompidou, a cependant alerté sur la nécessité pour les bibliothécaires de ne pas concevoir la bibliothèque en cédant au modèle consumériste véhiculé par Internet : “le grand chantier est de repenser le métier de bibliothécaire avec la notion fondamentale d'accompagnement. Aujourd'hui ce sont les détenteurs de contenus, comme les musées, qui sont en train de réinventer la bibliothèque. Les bibliothécaires doivent se réapproprier les contenus et se penser comme des méta-bibliothécaires. ”