11 AOÛT - PREMIER ROMAN Etats-Unis

Originaire du Michigan, Carey Wallace a fait un peu tous les métiers. Elle vit aujourd'hui à New York, où elle a écrit son premier roman, La comtesse des ombres, sans doute l'une des plus jolies surprises de cette rentrée littéraire.

Carey Wallace- Photo ALICIA HANSEN/PRESSES DE LA CITÉ

Le livre s'inspire librement d'une histoire authentique : comment, en Italie, en 1808, Pellegrino Turri, un inventeur lunaire que ses échecs passés ne faisaient guère prendre au sérieux, imagine et fabrique la première machine à écrire pour son amie, la jeune et belle comtesse Carolina Fantoni, qui est devenue complètement aveugle. Grâce à sa machine, qu'il lui offre en gage de son amour (en principe impossible : chacun est marié de son côté, et le comte est jaloux), la jeune femme plongée dans les ténèbres va pouvoir à nouveau écrire et même, grâce au papier carbone (procédé artisanalement mis au point par Turri aussi), envoyer des messages à ceux qu'elle aime : son vieux père, et Turri lui-même, bien sûr. Afin de lui fixer des rendez-vous secrets dans cette maison au bord du lac qui est son refuge depuis l'enfance, quand elle y passait des soirées seule, au coin du feu, à lire ses poètes favoris.

Maintenant qu'elle ne le peut plus, c'est Angelina, sa femme de chambre et - en principe - de confiance, qui s'en charge pour elle. Mais de même qu'elle invente des dessins dans les albums que Turri prête à Carolina pour distraire sa solitude quand ils ne sont pas réunis, la servante est-elle fidèle à sa maîtresse ou une espionne dévouée au mari, le beau Pietro ? Un être égoïste, possessif, frivole, infidèle, qui n'a voulu croire à la cécité de son épouse que lorsqu'il fut trop tard pour tenter de la soigner. Il déteste Turri et parviendra à le séparer de Carolina, lorsqu'ils seront enfin devenus amants et s'apprêteront à fuir ensemble...

Dans la réalité, Turri et la comtesse entretinrent une correspondance durant toute leur vie, dont on n'a retrouvé que quelques lettres de Carolina. La machine, elle, est détruite à la fin du roman. On sait que ce ne fut pas le cas et on connaît le destin de cette invention révolutionnaire. Chaque fois que l'on tape sur le clavier d'un ordinateur, héritier de la pas si lointaine machine à écrire - laquelle redevient, semble-t-il, à la mode chez certains jeunes addicts des objets vintage -, il faudrait avoir une pensée pour Turri, dont Carey Wallace fait le héros attachant de son roman, qui ne l'est pas moins. C'est un conte romantico-philosophique triste, parfois à la limite du fantastique, une fable hors du temps, située dans un pays fantasmé et non décrit avec précision. Carey Wallace confie d'ailleurs qu'elle ne connaissait pas l'Italie avant d'écrire son livre. Peu importe : passionnée par les vieux pays chargés d'histoire, elle en a fait sa terre d'élection et de création.

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