10 mai > Beau Livre France > Jean-Marc Besse et Gilles A. Tiberghien

"Pourquoi un paysage ne peut pas ne pas être spirituel", développe l’historien médiéviste Dominique Iogna-Prat dans le riche numéro 31, sur le thème du Sacré, des Carnets du paysage, la revue spécialisée, fruit d’une coédition des éditions Actes Sud avec l’Ecole nationale supérieure de paysage à Versailles. Sacré : cette notion malléable, entendue ici dans un sens large qui intègre et dépasse les religions, sied bien à l’ambition pluridisciplinaire, pointue et éclectique, de la revue qui convoque histoire, sociologie, anthropologie, littérature, art et écologie. Sacré : "étymologiquement "ce qui est à part", ce à quoi il est interdit - ou impossible - de se mesurer sans remettre en question tout l’édifice social et naturel", retient comme définition l’architecte paysagiste Denis Delbaere qui signe l’introduction de ce numéro et une étude sur la "spatialité christique" à travers la vie de saint Fiacre, un ermite de l’époque mérovingienne, "patron des jardiniers". A noter aussi deux entretiens avec deux chrétiens du monde agricole contemporain : un expert, ancien membre de la Jeunesse agricole catholique, mouvement des années 1960 qui a eu un impact décisif sur l’organisation des campagnes françaises, et un agriculteur picard, protestant évangélique, engagé depuis vingt ans dans un projet de "restructuration paysagère" de son exploitation.

Egalement au sommaire, ces hauts lieux du sacré que sont les cimetières, avec la reproduction de cinq clichés tirés de la série de Cecil Mathieu sur le sanctuaire au milieu de la jungle de Bukit Brown à Singapour. Et, plus technique, la contribution de Nils Audinet, "La mort invisible. Composer avec la décomposition", autour de la question du sol sur ces territoires rattrapés eux aussi par les questions environnementales.

La revue n’oublie pas non plus sa vocation internationale avec les articles sur les cours jardins du Bénin méridional, les montagnes sacrées de Chine et celles de la tradition gnawa au Maroc, ou l’analyse de l’exposition de l’artiste japonais Kôichi Kurita, en 2014, à l’abbaye de Maubuisson, par l’historienne de l’art et marcheuse Marie-Claire d’Aligny. V. R.

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