Semaine de la dernière chance pour L'île lettrée

Semaine de la dernière chance pour L'île lettrée

La librairie du Boulevard Magenta à Paris ouvre son capital aux clients qui souhaitent la sauver.

Par Vincy Thomas
avec vt Créé le 15.04.2015 à 21h52

Créée en 1999, la librairie L'île lettrée (10 000 références) située boulevard Magenta, à proximité de la Gare du Nord, à Paris, vit une semaine cruciale. Le 31 mars, elle pourrait déposer le bilan de manière définitive. Depuis quelques semaines, une affiche mentionnant « bail à céder » alerte les passants et les clients, surpris, de la fermeture du magasin. Le quartier a déjà du subir le départ du marchand de journaux et celui de la papeterie voisine, devenus respectivement un magasin Nicolas et une agence d'intérim.

La librairie avait déjà déposé son bilan en 2005 suite à l'impact des travaux de voirie du boulevard Magenta, qui avait rendu L'île déserte. La galerie, au sous-sol, qui accueillait les débats et animations, avait du fermer à cause d'une inondation. Après deux ans de redressement judiciaire, un plan de continuation de neuf ans a été décidé, afin d'apurer la dette.

Le déménagement en 2009 du 89 au 99 boulevard Magenta a permis, avec la cession du premier bail, d'obtenir un peu de liquidités. Mais les intempéries et les grèves de la fin de l'année 2010 et les ventes trop faibles de ce début d'année ont fragilisé la structure, qui est désormais proche de la banqueroute. La société subit toujours le poids de sa dette.

Samia Berrandane, la propriétaire de la librairie, ne baisse pourtant pas les bras. Elle a commencé par ouvrir le capital au public. La part vaut 175 euros et l'augmentation de capital peut permettre d'augmenter la trésorerie. De nombreuses promesses de souscriptions sont déjà parvenues. Mais cela ne suffira pas à combler les pertes de décembre dernier qui s'élèvent à 20 000 euros.
Pas découragée, la libraire a en outre lancé des offensives tout azimut : ouverture d'un blog sur internet, livraison dans les boîtes aux lettres des livres commandés, relance des ateliers (enfants, adolescents) et débats avec la réouverture de la galerie, ouverture d'un rayon papeterie (avec l'aide de l'ancien papetier voisin), séances de lectures (la comédienne Dominique Blanc a promis d'en faire deux). Le Conseil régional a même accepté de soutenir le projet de revue littéraire gratuite distribuée dans le métro, De lecteur à lecteur.

La Mairie de Paris, en revanche, ne semble pas s'être saisie de la question. Aucun message de soutien, aucune action de la part de la municipalité pour sauver la dernière entité culturelle du boulevard. Aucun des adjoints concernés n'a répondu à nos questions. « C'est un acte politique de conserver des librairies » explique la propriétaire. « Mais on est tous responsables, les citoyens comme les élus ». La Mairie, qui, officiellement lutte contre la monoactivité commerciale, laisse ainsi le boulevard Magenta se remplir d'agences d'intérim. Déjà l'une d'entre elle est prête à reprendre le bail de la librairie pour une bouchée de pain.
15.04 2015

Auteurs cités

Les dernières
actualités