Albin Michel, qui avait publié les deux derniers polars de Pierre Lemaitre, Alex et Sacrifices, a bien failli voir Au revoir là-haut lui échapper. « J’avais constaté les difficultés de mes confrères à réussir leur passage de la littérature noire à la blanche, explique l’écrivain. J’ai cru à un moment devoir opérer moi-même une rupture en changeant soit de nom, ce que je ne voulais pas, soit d’éditeur. » C’est Francis Esménard lui-même, président de la maison, qui à la lecture d’Au revoir là-haut a convaincu son auteur de rester.
« Toute la maison s’est mobilisée, se souvient Pierre Lemaitre, et Pierre Scipion, mon éditeur depuis Alex, a su m’accompagner en comprenant parfaitement mon projet. » Travaillant chez Albin Michel depuis vingt-cinq ans, chargé notamment d’Eric-Emmanuel Schmitt, Gilles Lapouge ou encore Agnès Ledig, Pierre Scipion assure que le franchissement de la barrière des genres s’est fait naturellement. « On retrouve dans Au revoir là-haut des éléments caractéristiques de l’univers de l’auteur : une tension dans l’écriture, une vision du monde assez noire, des personnes toujours limites… Son roman s’inscrit dans l’évolution de son travail. D’ailleurs, dès notre première rencontre en 2010, Pierre Lemaitre m’avait parlé de ce projet. »
«J’ai commencé Au revoir là-haut en 2008, confirme l’intéressé. Mais, à ce moment-là, il arrivait trop tôt. Je me faisais tout juste connaître comme auteur de polars. » Ayant quitté sa maison de l’époque, Calmann-Lévy, après le départ de son éditrice Béatrice Duval, Pierre Lemaitre est arrivé discrètement chez Albin Michel. Remarqué par Lina Pinto, responsable des manuscrits, il y a creusé son sillon dans l’univers du roman policier, comme il le souhaitait, pour pouvoir aujourd’hui basculer vers la littérature avec un projet de fresque couvrant l’ensemble du XXe siècle et dont Au revoir là-haut constitue le premier pas. <