18 avril > autobiographie France-Pologne

Certaines personnes ont un prénom prédestiné. En choisissant le titre de son autobiographie, Polanski ne s’y est pas trompé : Roman par Polanski. Le cinéaste primé dans le monde entier a écrit ce texte il y a trente ans, mais la réédition propose un condensé des chapitres suivants, à savoir sa version des événements. Avec "l’idée de mettre sur papier ce que je crois être ma vérité". Sa voix est celle d’un conteur nous entraînant dans une aventure dramatique, rocambolesque et fulgurante. "Aussi loin que je remonte dans mes souvenirs, la frontière entre le réel et l’imaginaire a toujours été désespérément brouillée." Peut-être pour mieux échapper à la banalité ou à la cruauté d’une destinée, qui débute pour lui à Paris, dans une famille aimante, puis le conduit à Cracovie.

L’enfant, "exigeant enclin aux bouderies", grandit dans une relative insouciance, mais l’invasion nazie brise cet univers apaisant. Les Polanski sont juifs, et leur sort est confiné au ghetto. Roman est séparé des siens, qui ont pris des dispositions pour le sauver. Ballotté d’une famille à l’autre, il se sent tantôt déchiré, tantôt exalté par la découverte "d’un monde nouveau". "C’était comme si commençait pour moi une nouvelle vie." La campagne lui enseigne une leçon cruciale, "un perpétuel combat pour survivre".

L’après-guerre apporte son lot de chagrins, mais ce boute-en-train ne se laisse pas démonter. Alors qu’il se perçoit comme "un fardeau illettré dont l’avenir se résumait à un grand point d’interrogation", il devient comédien. Un tremplin pour un rêve nettement plus grand, le 7e art. "Le cinéma devient ma passion dominante - ma seule évasion hors du désespoir et de la détresse qui m’envahissaient par moments." Persévérant, Polanski parvient à intégrer l’école de cinéma de Lodz. L’ère politique modifie le paysage polonais, les stigmates de la guerre et du communisme imprègnent tous les domaines, y compris la création des pays de l’Est.

Epris de liberté, Roman part à Paris. Il y cumule les galères, mais grâce à une volonté de fer et à ses amis, il s’en sort toujours. Enfin les portes s’ouvrent, y compris à Hollywood. Une grande partie du livre relate les dessous de chaque film. Les femmes sont ses Muses, à commencer par Sharon Tate, dont l’effroyable disparition le laisse abasourdi. Les médias se transforment en vautours, surtout lorsque la justice l’accuse d’avoir abusé d’une mineure. Roman Polanski demeure fascinant dans ses réflexes d’éternel survivant. Il frôle les limbes et les lignes de fracture, mais il doit son "propre ressort" à sa mère. Ainsi, il garde "l’intuition émerveillée de ce que la vie a à offrir". Kerenn Elkaïm

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