A marée basse (éditions des Deux Terres, 2008, repris au Livre de poche), le premier roman de Jim Lynch, imposait un ton et une sensibilité. L'Américain y racontait l'adolescence de Miles, un garçon de 13 ans qui grandit dans une baie de l'Etat de Washington. Avec A vol d'oiseau, le voici qui change à la fois de registre et de décor.
L'action de ce livre étonnant se situe à la frontière qui sépare les Etats-Unis du Canada. Brandon Vanderkool, le héros principal de Lynch, est un peu à côté de ses pompes. Colosse un peu spécial, Brandon est parfois surnommé "Super Dingo" ou "Big Bird". Il faut dire qu'il peut reconnaître les oiseaux à l'oreille et reproduire leur chant.
Par miracle, au vu de son parcours scolaire, Brandon a réussi à intégrer la police des frontières où il traque désormais les clandestins. Il habite toujours chez son père, Norm, qui est à la tête d'une exploitation laitière de dix-sept hectares et se déclare favorable au port d'armes. Sa mère, Jeanette, perd peu à peu la boule. Il lui arrive ainsi d'affirmer que "les autruches cherchent de l'eau quand elles enfoncent la tête dans le sable", que "tous les ours polaires sont gauchers".
Dans les parages, ne pas manquer Wayne Rousseau. Professeur de sciences politiques à la retraite - doublé d'un "irrévérencieux spécialiste des citations" -, celui-ci se passionne pour Edison et a décidé de refaire lui-même les grandes inventions. Sa fille cadette Madeline, elle, cultive les plants d'un fumeur de hasch local. Quant à Sophie Winslow, la masseuse que tout le monde consulte, elle mérite haut la main le titre de reine des commères !
Par un concours de circonstances qu'on ne dévoilera pas ici, Brandon Vanderkool a permis de déjouer les plans d'un terroriste. Ce personnage tout droit sorti d'un roman de Steinbeck se retrouve du jour au lendemain propulsé héros malgré lui... Drôle, touffu, plein de digressions et de portraits, A vol d'oiseau séduit avec son mélange délirant des genres et sa manière de peindre les contours d'une autre Amérique.