Les amateurs de curiosités doivent se pencher sur le nouveau volume de Thomas Clerc. L’auteur de L’homme qui tua Roland Barthes (Gallimard, « L’Arbalète », 2010) s’y essaye à un exercice précédemment tenté par Edmond de Goncourt ou Mario Praz. Et entreprend donc la description minutieuse de son appartement. Nous voici dans le 10e arrondissement auquel Thomas Clerc a déjà consacré un ouvrage en 2007. Devant un immeuble du XVIIIe siècle, avec cinq étages et seulement deux fenêtres sur la façade, dont le code est 54 B 68.
L’appartement en question, où il réside depuis février 2002, est un deux-trois pièces de 50 m2 situé à Strasbourg-Saint-Denis. La porte n’est pas aux normes. L’entrée, froide en hiver, est peinte en blanc. Au sol, un parquet en vieux chêne jadis recouvert d’un lino. Il y a ici des placards, des tiroirs. Un seul « bel outil » : un marteau volé à l’ouvrier venu réparer le chauffe-eau de la salle de bain.
La salle de bain est de petite taille, « relativement minable ». Les toilettes sont « exiguës ». La cuisine, américaine. Le salon, lui, vire au dépouillement. « L’objet roi » du bureau est un Apple iBook G4 acheté à tempérament. Quant à la chambre, elle abrite vingt-quatre chemises - quinze à motifs, et neuf unies.
Thomas Clerc se livre à des réflexions, des digressions. Parle de son dentifrice et de sa brosse à dents, donne sa marque favorite de lessive et de slip. Durant la visite, le lecteur en apprend un peu plus sur l’occupant des lieux. Un homme qui avait 39 ans au moment de la mort de Guillaume Dustan et ne rapporte rien de ses voyages. Un maître de conférences à la faculté de Nanterre, critique littéraire et chroniqueur vouant un culte à Edgar Allan Poe. Un « écrivain post-conceptuel », pour qui l’art conceptuel est « le plus beau des arts », affirmant que la littérature le touche « parce qu’elle ne respecte rien ».
Singulier et fascinant, son Intérieur mérite qu’on l’explore de fond en comble.
Alexandre Fillon
