En 2019, 182 000 immigrés sont entrés en France. Le premier objectif à l'arrivée est d'avoir des repas et un toit. Vient ensuite l'accès à internet, pour donner des nouvelles aux proches. Puis l'insertion. Pour ces deux derniers points, les bibliothèques sont des actrices de premier plan pour les personnes les plus précaires.
Si un réfugié ne parle pas français, les bibliothèques peuvent proposer des affiches avec peu d'écriture et des ateliers linguistiques, sur place (en partenariat avec des associations ou des bénévoles bilingues) ou en ligne (avec l'aide de leur bibliothèque départementale ou de Bibliothèques sans frontières). En complément, on mélangera les nationalités, lors de lectures collectives d'imagiers ou d'ouvrages comme Chaprouchka, où Elsa Valentin et Florie Saint-Val revisitent Le Petit Chaperon rouge en introduisant différents dialectes. « Les enfants qui écoutent des sonorités éloignées de leur propre langue musclent leurs oreilles et apprennent plus facilement d'autres langues », vantait Coline Rosdahl, de l'association d'éducation au plurilinguisme Dulala, lors du Congrès de l'ABF de 2021 centré sur l'inclusion. Pas d'album multilingue ? Un bilingue peut le traduire de manière artisanale, avec des Post-it ! Des rendez-vous peuvent être réservés, sans les enfants, pour qu'ils s'emparent du projet de plurilinguisme. « Les mères se sont senties valorisées », observe Marine Muller, responsable des actions culturelles du réseau de médiathèques de Plaine Commune. Elle rappelle l'importance de travailler avec les professionnels de la petite enfance et du champ social qui jouent les relais. Les professeurs de langues de collèges peuvent également participer à la traduction d'ouvrages avec leurs élèves.
Autre manière de valoriser les échanges culturels : un repas où chacun présente une spécialité de sa région, comme à la médiathèque Estaminet, à Grenay où, le même jour, une troupe de théâtre lisait des textes sur le vivre-ensemble...
Les ateliers d'éducation civique, de défense des droits ou de recherche d'emploi peuvent aussi se tenir dans les locaux d'une médiathèque. Les bibliothèques de New York mettent à disposition des informations sur l'obtention de la carte verte (résident permanent) à l'entrée. Lors d'un séminaire de l'Ifla en 2017, on apprenait qu'en Suède, ceux qui reçoivent leur permis de résidence sont réunis pour visiter une bibliothèque pendant une demi-journée, pour emprunter des livres, suivre un cours d'informatique... En somme, les bibliothèques peuvent développer une diversité de services, à l'image de la diversité des profils des personnes.