En préface à l'excellente anthologie qu'elle a composée, Judith Stora-Sandor explique que le volume en question présente "des textes littéraires tirés des oeuvres d'auteurs d'époques et d'aires géographiques les plus diverses". En revanche, la professeure émérite de littérature comparée à l'université Paris-8 tient à préciser qu'elle "n'est pas en mesure de proposer une définition simple et claire de l'humour juif", même après avoir consacré "une quinzaine d'années à l'étude ce sujet", qui était celui de sa thèse d'Etat.
Le panorama proposé inclut des écrits "d'humoristes "de métier"", mais surtout des extraits de romans et de nouvelles d'auteurs juifs ou d'origine juive. "Ce qui prouve, dit Judith Stora-Sandor, que si les histoires juives font partie du patrimoine commun du peuple juif, l'humour est un ingrédient essentiel de sa littérature."
Le volume démarre avec une délicieuse section consacrée à la famille, "prison tout confort" où trône la figure de la mère avec son amour encombrant et écrasant. Comme l'attestent des extraits choisis dans Portnoy et son complexe de Philip Roth ou dans Comment devenir une mère juive en dix leçons de Dan Greenburg. Sont passés ensuite en revue des thèmes aussi importants que la maladie, la nourriture ou l'éducation, Judith Stora-Sandor allant piocher pour cela dans les pages d'Italo Svevo, Isaac Babel ou Groucho Marx. N'oublions pas la question du mariage, ou la "JAP", la "Jewish American Princess", croisée notamment dans Le monde de Barney du génial Mordecai Richler.
Plus loin, le lecteur en apprend également plus sur le shtetl, le "shnorrer" et sa "khutzpe". S'interroge sur la possibilité de rire après Auschwitz, entend parler d'amour, et s'en va joyeusement piocher chez Saul Bellow, Isaac Bashevis Singer, Dorothy Parker, Cyrille Fleischman, Joseph Heller, Grace Paley, Edgar Hilsenrath ou même Tristan Bernard.