Sortir de la pénombre. « Peut-être, la vie telle qu'on l'avait connue disparaîtrait un jour. » Telle est la sensation qu'éprouvent les habitants d'un village retiré lorsque le soleil semble les bouder. Les voilà soudainement plongés dans une nuit éternelle. « Y'a rien à comprendre. Les choses arrivent, c'est tout. » Mais comment vont-elles rejaillir sur les êtres qui y sont confrontés ? À travers son regard d'enfant, Gautier y fait face en observant les adultes qui s'accrochent à la lune, dernier rempart contre le noir. Seule Anna semble totalement éblouie. Cela fait des années qu'elle vit aux côtés d'une mère absente, qui souffre de dépression profonde. « Anna avait toujours refusé de comprendre l'état de sa mère, d'où il venait, comment il s'était construit, pourquoi une femme s'était enfermée dans le chagrin, sans vouloir en sortir. » L'adolescente préfère au contraire s'évader, vivre en dépensant sa belle énergie. « Maintenant la nuit l'enserre. C'est une nuit comme un vœu fait avant d'éteindre une bougie. » Le sien étant de vibrer à l'amour. Voilà qu'elle connaît sa première fois avec un garçon. « Ce qu'ils vivaient là, leur appartenait. C'est donc ça, vivre. Pierre pense à ce monde qui les attend et les protégera. » Ethel ne partage pas sa vision optimiste. Cette femme, qui a troqué la ville contre la campagne, se retrouve à nouveau en compagnie de ses doutes. « Elle était perdue, elle voulait se trouver. Mieux, devenir », ou fuir. Au fil du temps, elle s'est pourtant intimement rapprochée de Josselin. Cet homme, autrefois si beau, s'est transformé depuis un accident qui l'a défiguré. « Il disait toujours "ma terre, mes bêtes". Sa maison, c'était sa mémoire et sa vie », alors pourquoi a-t-il basculé dans la haine, notamment envers une femme considérée comme une sorcière ? À l'instar des autres villageois, il devra se réconcilier avec lui-même et la nature. « Un jour il faudra l'écouter la chérir/la forêt en nous. » Sans oublier de garder une lueur d'espoir. « Nous avons cru le monde venir à bout des/choses/des êtres/alors que tout respire encore un peu », grâce à l'écriture de Laura El Makki. Femme de radio (France Inter), biographe des sœurs Brontë, elle nous encourage à cultiver la magie d'exister dans cette « nuit de tous les possibles ».