2 avril > Premier roman France

A l’heure où des Cassandre ne cessent de nous annoncer la mort du livre papier, il est plutôt réjouissant de constater que nombre de romans mettent le livre et ses métiers (auteurs, mais aussi libraires, éditeurs) en vedette, au cœur de leurs intrigues. Fascination contre défaitisme, humour contre sinistrose, on ne peut qu’adhérer. Fabrice Lehman, à son tour, qui fut consultant en stratégie, succombe au mini-phénomène, avec un roman moqueur des travers de notre époque en folie.

Benjamin Fabre, le narrateur, fait partie du staff de Pelletier Consulting. Il gagne bien sa vie, est marié à Myrtille, qui a elle-même un job de consultante, lui pardonne ses fantaisies et le soutient quoi qu’il arrive. Le profil idéal de la "femme d’écrivain". Car Benjamin souffre d’une obsession : il rêve de voir publié Le texto de Wolfgang, son chef-d’œuvre, que tous les éditeurs lui refusent depuis dix ans !

Il va falloir un enchaînement de circonstances -viré de chez Pelletier, il se consacre uniquement à l’écriture - et l’entrée dans sa vie de figures du milieu littéraire pour que tout se décoince et que son rêve se réalise, enfin. Sera-t-il publié par les éditions Glu, croisés de la Guilde du Papier contre Internet, mais rachetées par des Qataris désireux d’investir dans l’édition française ? Ou par les éditions Barberouge, dirigées par l’héritière du nom, Tiphaine, prestigieuses mais en faillite ? Aura- t-il du succès et deviendra-t-il aussi célèbre que Stéphane Figuier, alias Raphaël Minimum, recordman des best-sellers, dont il fait la connaissance à Francfort, et à qui il a l’imprudence de demander aide et conseils ?

Benjamin, lui, apprendra à ses dépens qu’une femme déséquilibrée et trahie - Tiphaine raconte toute sa vie dans des lettres à sa mère morte - peut être dangereuse, qu’un confrère battu au tennis peut avoir la rancune tenace, et que, dans l’édition formatée par le marketing, la célébrité est de plus en plus éphémère. La fable pourrait être grinçante si la délicieuse Myrtille, dea ex machina, ne venait sauver la mise de son homme, pris dans une tourmente qui le dépasse.

Cette Pétulante ascension est un roman contemporain, bien mené, écrit allegro, au dénouement inattendu, une belle déclaration d’amour au livre-papier. J.-C. P.

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