Arrigo Lessana a ouvert le cœur des gens pendant trente ans et est d’origine italienne. Ce sont deux données biographiques que l’on a forcément en tête lorsque l’on rencontre le héros de son premier roman, Ferdinand, chirurgien cardiaque, pratiquant à Paris (ou une ville qui y ressemble) et en "contrat trimestriel" dans un hôpital de Brindisi.
Découpant en tranches les vies d’une demi-douzaine de personnages - deux femmes, un psy, un avocat, un couturier… - gravitant autour du médecin, Le sens de l’orientation est surtout le portrait diffracté d’un praticien aguerri qui navigue pourtant à vue dans ses relations amoureuses, d’un homme plus doué pour la compréhension de la mécanique des corps que du décodage des âmes. Un homme débordant d’une vitalité mâle, jouisseuse et esthète : déguster des grands crus, parler gastronomie, citer aussi spontanément Mallarmé que So foot, piloter toutes sortes d’engins motorisés, escalader les sommets, même si, lors des courses dans le massif des Aiguilles rouges avec son ami Pascal le montagnard, il estime que "le moment suprême, on le trouve au pied de la voie".
Dans son théâtre des opérations, la conduite intérieure est plus erratique. Ferdinand s’égare peu à peu. Sans doute ce qui l’amène deux fois par semaine depuis quatre ans dans le cabinet de Valentin. "Tu as besoin de comprendre… En toutes circonstances, tu veux comprendre ! Tu t’appropries les choses, les gens, les idées, tu les collectionnes. Et tu me fatigues, Ferdinand", lui reproche Eléonore, la mathématicienne qui l’a quitté. Percera-t-il mieux le cœur de Paola, l’Italienne flamboyante, rencontrée dans un bar, le mal nommé L’Etoile du nord ? De tableau en tableau, Arrigo Lessana, auteur de L’aiguille, un récit publié chez Denoël en 2010, trouve une façon plus intime et indéniablement romanesque d’évoquer son fascinant métier. V. R.