6 SEPTEMBRE - ROMAN Brésil

Au cours de sept nuits consécutives, le narrateur recueille les souvenirs de son père adoptif, incarcéré dans une prison brésilienne, vieillard mourant auprès duquel il a grandi à la fin des années 1950, à Cidade Livre, "la Ville Libre". Cette "ville jetable" surgie de rien sur un plateau de l'intérieur du pays, le Planalto central, faite de baraquements de bois, accueillait alors une population d'exilés travaillant à l'édification du projet urbanistique le plus ambitieux et idéaliste du Brésil contemporain : la construction de la nouvelle capitale, Brasilia, inaugurée le 21 avril 1960 au terme de trois ans et demi de travaux.

Au sein d'une communauté hétérogène, dans un décor de Far West tropical, le garçon a vécu dans une singulière famille recomposée, entouré de deux tantes : la pieuse et droite Francisca, fournisseuse de denrées alimentaires, et la sexy et révolutionnaire Matilde, fonctionnaire dans un ministère. Les deux incarnant un îlot féminin érotique dans un environnement viril de pionniers bâtisseurs. Des héros obscurs tous plus ou moins missionnaires : le père du narrateur se rêvait greffier de la naissance de la ville et recueillait, en chroniqueur mondain improvisé, les impressions des visiteurs illustres ; le timide et délicat Valdivino, un paysan venu du Nordeste, comme des centaines de "candangos", ouvriers du bâtiment embauchés sur le chantier, avait quant à lui une vocation de constructeur d'églises et se consumait d'un amour sans réciproque pour une prophétesse guidée par des illuminations. Se mêlaient, dans cette zone franche, commerces plus ou moins louches, passions vénéneuses et cosmogonie superstitieuse.

Les confidences, les différentes versions de l'histoire, la question notamment des conditions de la mort de Valdivino, arrivent en ordre dispersé au rythme de ces ultimes moments de confrontation entre le père et le fils. L'originalité de la narration, qui retrace avec force détails les étapes d'une incroyable utopie collective, tient aussi à la position du narrateur, prénommé comme l'auteur João, qui inclut dans son récit les commentaires et les interventions de lecteurs d'un blog, qui forment comme un comité de rédaction fantôme, saupoudrant d'un supplément de fiction le déjà très légendaire roman de Brasilia.

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