1er octobre > Roman Mexique

Après s’être glissé Dans le terrier du lapin blanc (Actes Sud, 2011), premier roman drolatique dont le héros était déjà un gamin, rejeton de mafieux, Juan Pablo Villalobos poursuit sa trilogie consacrée à son pays, le Mexique, du moins un certain Mexique, vu par les yeux de certains de ses enfants. Sans concession, avec un sacré sens de l’humour pince-sans-rire et du politiquement incorrect.

Le narrateur, ici, s’appelle Oreste, un surdoué qui tente de raison garder au milieu d’une famille de fous furieux. Son père, professeur d’instruction civique et fan de l’Antiquité, a prénommé ses enfants Aristote, l’aîné, puis Oreste, Callimaque, Electre, Archiloque et Castor et Pollux, les petits derniers, "jumeaux pour de faux". Outre son métier, c’est un homme en colère contre la religion, le système et les politiciens véreux (on est dans les années 1980, mais rien n’a vraiment changé depuis), qu’il insulte à longueur de temps, en "professionnel" : "- Mais quelle bande de connards ! Ah, ces enfants de salauds nous prennent vraiment pour des cons !" La smala vit non loin de Guadalajara (mais n’y va jamais), dans une "boîte à chaussures" construite sans permis sur la colline de la Foutaise, laquelle commence à faire l’objet de spéculations immobilières. Ce n’est pas la misère, mais pas loin, et Oreste ne cesse de répéter qu’il en a "marre d’être pauvre", lorsqu’il faut se battre à chaque repas pour sa ration de quesadillas, les galettes de maïs fourrées au fromage qui constituent son ordinaire.

Deux événements vont venir bouleverser tout ce petit monde. Castor et Pollux disparaissent un beau jour, dans un supermarché, et ne donneront plus de leurs nouvelles. Ont-ils été enlevés par les extraterrestres, comme le prétend Aristote ? Et puis des voisins viennent s’installer juste à côté, des riches, des Polonais. Le père est inséminateur de vaches, ils ont un fils, Jarek, qui pourrait devenir copain avec Oreste. Jusqu’à ce que le garçon, poussé par son "abruti" de frère aîné, fugue pour retrouver les jumeaux "pour de faux", et surtout tenter d’échapper à son triste sort. Au terme d’aventures cocasses (dont un bref séjour en prison où il retrouve son oncle, Pink Floyd, junkie notoire), Oreste reviendra à son bercail, menacé par les promoteurs, où il vivra un final délirant.

Construit en sept tableaux très visuels, porté par un style inventif et "fleuri", Si nous vivions dans un endroit normal est aussi épatant que Dans le terrier du lapin blanc. On attend déjà le troisième volet de la saga. J.-C. P.

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