16 octobre > Roman France

Gueux, dans la Marne, 1 745 habitants, bourg cossu de l’ouest de Reims connu pour avoir abrité durant les années 1950 et 1960 un circuit automobile de Formule 1. A part cela, rien, ou si peu. Une page blanche ouverte sur cette France périurbaine que la fiction peine à réenchanter.

Sébastien Marnier- Photo DR/LATTÈS

En fait de peine, voici deux ans, c’est la sienne, celle d’un amour perdu pour un garçon, d’espoirs professionnels fracassés (son premier film a été l’un de ces fours dont on ne se remet pas), qu’est venu exiler et soigner Théophane Tolbiac auprès de sa grand-mère Suzanne, veuve joliment indigne et auteure à succès de romans noirs. Aujourd’hui, la reine champenoise du crime n’est plus, mais son souvenir continue d’étendre sur son petit-fils son ombre bienveillante. Celui-ci, par désœuvrement ou conviction, a décidé de se présenter en candidat « sans étiquette » aux prochaines élections municipales et, bien aidé par les fiches que rédigeait en secret sa redoutable grand-mère sur chacun de ses voisins et futurs administrés, contre toute attente, il pourrait bien être élu. Une vie s’offre alors à lui, une vie de petits-fours et de gros ennuis peut-être, mais préférable au vide et au chagrin qui l’avaient précédée.

Après Mimi (Fayard, 2011) et le roman collectif Qu4tre (Fayard, 2013), sec comme une saine colère, Une vie de petits-fours est le troisième roman de Sébastien Marnier. Ce n’est pas le moins courageux tant il se coltine une matière romanesque (le politique et la province, dans leur violence, leur incongruité, leur obscénité parfois, leurs servitudes toujours) qui demeure largement ignorée de la fine fleur de la fiction française. Son Théophane entre deux eaux est juste, et la grand-mère en tenue léopard est bien (on peut penser que la mystérieuse Mario Ropp, auteure à succès, aujourd’hui oubliée, de polars au Fleuve noir a pu lui servir de modèle). Alors n’hésitons pas, votons Théophane !

Olivier Mony

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