Dans Le droit au sexe, la philosophe Amia Srinivasan explore la sexualité sous un angle féministe qui la replace dans une réflexion politique. Car les enjeux de pouvoirs sont ici déterminants. Par exemple, aux levées de boucliers masculinistes qui dénoncent de fausses accusations de viols signalés par les femmes, elle répond notamment par des statistiques. La rareté de ces cas et la multitude de cas d'agressions commises par des hommes sur des femmes balaient assez rapidement la validité d'une « conspiration contre les hommes ». La législation des relations intimes entre enseignants et étudiants est à ce titre intéressante. L'autrice met en lumière la position symbolique de l'enseignant, qui, souvent bien plus âgé que ses élèves, a pour rôle de leur transmettre un savoir et d'imposer une distance nécessaire au développement de ce savoir sans céder au transfert... À chaque question soulevée, elle présente plusieurs exemples et contre-exemples pour témoigner de l'ambivalence des comportements sociaux et du droit quant à la sexualité. Mais la philosophe critique le recours systématique à la justice, rappelant que l'interdiction ne fait pas disparaître les phénomènes sexuels criminels, contribuant parfois même à les camoufler.
C'est sur cette question que se penchent les historiens Fanny Bugnon et Pierre Fournié, dans leur riche et passionnant ouvrage Le sexe interdit. À travers soixante-dix pièces d'archives reproduites et traduites, allant de 1010 à 1930 - pénitentiel, lettres de rémission, procès, confessions, demandes de divorce -, ce livre révèle l'évolution des mœurs, des désignations, des pratiques et des représentations de la sexualité en France sur dix siècles. Outre l'évolution des pratiques admises ou non - l'homosexualité était placée au même rang d'ignominie que l'inceste au XIVe siècle et l'abstinence était la réponse aux problèmes de consentement-, c'est tout le rapport de la sexualité au contrôle (religieux, social et politique) qui se dégage de ces archives. Aussi observe-t-on l'ambivalence du droit, à travers les interdictions de la justice, sa reconnaissance des faits rapportés et les peines prononcées (de leur absence à leurs degrés divers) qui ne suffisent pas à rétablir l'égalité. Lire les témoignages, s'intéresser aux récits et aux termes employés pour qualifier ces expériences, reste une des clefs pour saisir certains enjeux intimes et politiques de la sexualité.
Le sexe interdit. La sexualité des Français et sa répression
l'Iconoclaste
Tirage: 7 000 ex.
Prix: 26,90 € ; 528 p.
ISBN: 9782378801007
Le droit au sexe. Le féminisme au vingt-et-unième siècle Traduit de l’anglais par Noémie Grunenwald
PUF
Tirage: NC
Prix: 24 € ; 360 p.
ISBN: 9782130836131