Au pays de l'ami. Parce que c'était lui, parce que c'était elle. Certaines personnes s'entendent, non pas grâce à quelque affinité commune, mais car elles ont ceci de commun qu'elles ne sont pas de l'endroit qu'elles habitent. C'est leur extranéité, l'écart vis-à-vis des autres, qui a créé le lien entre Gabriel et la narratrice de Vues d'intérieur après destruction. Arielle Meyer MacLeod y raconte comment eux, ces deux Orientaux en Occident, elle d'Israël et lui du Liban, se sont reconnus : « Le Moyen-Orient [...] nous avait immédiatement rapprochés. Le sentiment de l'exil aussi, cet état de flottement que nous connaissions bien, qui nous maintenait en permanence sur le côté, le bord, à la marge [... ]. » Gabriel est sculpteur, il a mille vies, mille amis, mille amants, il entraîne la narratrice dans les hauts lieux de la nuit gay, ils refont le monde ensemble enivrés d'alcool et de paroles...
Gabriel est seul au fond, il est déraciné, sans autre patrie que cette amitié forte entre eux. Né au pays du Cèdre, il revient sans cesse vers la maison de son enfance, au Liban quitté en 1978, et où il n'est jamais retourné. Entre anecdotes réelles et souvenirs sublimés, cette cartographie merveilleuse se déploie dans l'imaginaire de l'amie qui l'écoute. Le conteur lui promet qu'il l'emmènera dans ce coin du Levant. Mais la Camarde le rattrape, Gabriel succombe à la maladie. Vues d'intérieur après destruction est la relation de ce voyage que la dramaturge et écrivaine vivant à Genève fait seule. Fol périple que cet itinéraire qui rebrousse le chemin parcouru par Gabriel jusqu'à cette maison mythique. Et Arielle Meyer MacLeod de nous embarquer dans une exploration des ruines, vestiges d'un Liban ravagé par la guerre, nous plongeant dans l'intime qui hante ces pierres. À la manière d'un Sebald, elle se fait la topographe d'un paysage désolé et d'une mémoire meurtrie, glissant entre ses mots quelques photos de lieux. L'enquête sur le passé de Gabriel se double de sa propre quête : son père, cadre du Bureau International du Travail chargé d'informatiser les pays en développement, a un jour mystérieusement disparu laissant pour elle et son frère une lettre d'adieu... Arielle Meyer MacLeod décline ainsi le motif du manque et de l'énigme de l'absence en faisant vibrer ces pages d'une grâce pudique.
Vues d'intérieur après destruction
Arléa
Tirage: 2 000 ex.
Prix: 17 € ; 120 p.
ISBN: 9782363083623