Certains sont venus avant l’heure parcourir les murs de la Galerie Barbier. Le rendez-vous est donné à 19 heures ce jeudi 20 janvier pour le vernissage de l’exposition "Christophe Blain - Le monde sans fin". Une sélection de planches originales de l’album paru chez Dargaud est proposée à la vente. Les prix démarrent à 8000 euros. L’auteur est également présent dans la galerie du 9e arrondissement parisien. Peu avant le démarrage de l’événement, il dédicace l'un après l'autre le tirage de luxe de son album signé avec Jean-Marc Jancovici.
Il est appuyé par Jean-Baptiste Barbier, le gérant de la galerie. Debout à ses côtés, le galeriste raie au stylo rouge de la liste les noms déjà dédicacés. De la bande dessinée dans les galeries d’art ? Le phénomène n’est pas récent. Mais les prix de vente, eux, ont évolué. "Il y a 15 ans, une planche se vendait autour de 3000 euros" estime Jean-Baptiste Barbier. Aujourd’hui, elle peut atteindre facilement les 10000 euros. Un atout financier non négligeable pour les auteurs du 9e art.
La rémunération, argument de taille pour les auteurs de BD
Selon les galeries, le pourcentage du prix de vente de la planche revenant à l’auteur s'élève de 30 à 70%. A titre de comparaison, les droits d’auteur sur les ventes de BD en 2019 se situent entre 8 % et 12 % selon le nombre d’exemplaires vendus, estime La Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques. Cet argument a joué pour Elene Usdin. La galerie Barbier consacre une exposition à son premier album paru chez Sarbacane, René·e aux bois dormants. "Quand on réalise une bande dessinée, qui peut prendre plusieurs années de travail, nous signons une avance sur les droits d’auteur, mais nous ne touchons cette somme que plus tard, une fois qu’assez d’exemplaires sont écoulés", explique-t-elle.
Du côté des galeristes, la difficulté est de fixer un prix de vente. Dans la galerie Barbier, un prix minimum de 600 euros est fixé. Mais aucune règle n’existe. “Certaines planches ont une valeur artistique pour être exposées, d’autres ne s’y prêtent pas, tout dépend de la côte de l’artiste, de sa technique et de son originalité”, précise Rina Zavagli, responsable de la Galerie Martel.
La galeriste prévoit au mois de février une exposition sur Miroslav Sekulic-Struja et de sa bande dessinée traduite du serbo-croate par Ana Setka et Wladimir Anselme, Petar & Liza ( Actes Sud BD). “Miroslav a un dessin raffiné très moderne et contemporain qui peut parler pas que aux collectionneurs mais aussi aux amoureux du dessin”, se réjouit son éditeur chez Actes Sud, Thomas Gabison.
Quelle bande dessinée pour quelle galerie ?
Pour François Le Bescond, directeur éditorial de Dargaud et éditeur de Christophe Blain : “dès qu’il y a des originaux qui ne sont pas en numérique, les auteurs peuvent être exposés, mais certains univers graphiques s’y prêtent plus ou moins.” Un autre de ses auteurs, Nicolas Debon, est exposé à la nouvelle galerie Les Arts Dessinés ouverte par Huberty & Breyne le 11 janvier dans le Marais à Paris.
La structure a également ouvert un second espace rue de Miromesnil afin de pouvoir exposer “la nouvelle génération, les grands de demain”, selon le gérant Alain Huberty. Chez lui, le tarif minimum est fixé à environ 400 euros. “Un prix coup de coeur, selon le galeriste qui ajoute, ce n’est pas sérieux pour l’auteur de vendre une planche à 150 euros.” Même s’il concède que la popularité de l’auteur joue beaucoup dans le succès de la vente, d’autres critères existent. “Une planche de Milo Manara peut se vendre à 4000 euros et une autre, dans le même album, à 10000 euros.”
La raison tient dans la technique de coloriage ou encore la quantité de texte, certaines planches sont plus dans la narration,d’autres sont plus graphiques. Du même avis, Jean-Baptiste Barbier rappelle que la planche vendue en galerie a une fonction décorative. Il nuance toutefois : “certains collectionneurs cherchent des dialogues en particulier.” Le choix des planches et des prix sont toujours discutés avec l’auteur propriétaire des planches. En amont, “l’auteur doit passer le pas de vendre et accepter de voir son travail partir, au début c’est difficile mais au bout d’un moment on s’en sépare”, partage Elene Usdin.