No pasaran. Les livres numériques ne passeront pas. A la radio, dans la presse et dans son dernier livre, Premier bilan après l'apocalypse (Grasset), Frédéric Beigbeder se fait le champion de cette nouvelle résistance qui enrôle de plus en plus d'écrivains. Mais le combat semble déjà perdu. "Encore un instant, Monsieur le bourreau numérique. Laissez-moi finir cette page, s'il vous plaît, lire un dernier chapitre de papier", lance-t-il dans la préface de ses conseils de lecture.

Frédéric Beigbeder aurait-il raison ? L'Apocalypse serait-elle survenue sans que nous nous en apercevions ? Le sens de la nuance n'est pas le fort du nouveau juré Renaudot... Mais s'il nous propose la liste des cent livres qu'il tient à préserver de la catastrophe numérique et à lire sur papier, cinq autres écrivains ont éprouvé au même moment ce besoin d'inventaire : Arnaud Cathrine, Bertrand Leclair, Alain Finkielkraut, Mona Ozouf et, à travers une évocation de son enfance, Philippe Delerm. Derrière ces déclarations d'amour pour la lecture et les livres, souvent communicatives d'ailleurs, on sent poindre l'angoisse d'un monde en profonde mutation.

Ce n'est pas tout à fait par hasard. Au même moment, dans les coulisses des maisons d'édition, les négociations avec les plus grands acteurs du numérique avancent à grand pas. Au point que de nouveaux accords avec les principaux intervenants du commerce en ligne devraient être annoncés dans les prochaines semaines.

Cela n'effraie pas Sylvie Champagne. Cette prochaine redistribution des cartes aurait même plutôt tendance à la doper. Cette libraire vient d'ouvrir à Orléans un magasin de... 1 400 m2. Un événement devenu rare dans la librairie indépendante et un sacré pari sur l'avenir du livre. Forte de vingt-huit ans d'expérience, Sylvie Champagne mise sur sa capacité d'adaptation à l'évolution de la clientèle. Et aussi sur les nouvelles technologies, susceptibles selon elle d'élargir le nombre des lecteurs. Champagne !