Quelque 47 % des 4 000 personnes interrogées par Ipsos-MediaCT ont déjà entendu parler du livre numérique, mais seulement 5 % des sondés déclarent l'avoir testé, et 2 % se sont dits intéressés par cette expérience.
Cette étude intitulée Les publics du livre numérique était commandée par le Centre national du livre, et s'est trouvée étalée sur près de six mois de travail, entre septembre 2009 et février 2010, entre ses différentes phases de réalisation.
12 % de ceux qui n'ont pas entendu parler du livre numérique se disent néanmoins intéressés par cette expérience, et Ipsos MediaCT a identifié 19 % de lecteurs potentiels parmi ceux qui n'ont manifesté aucun goût particulier, mais dont le profil est néanmoins proche des précédents.
“
Au total, on peut estimer le marché potentiel à un tiers de la population”, estime Bruno Schmutz, responsable de l'étude.
Les répondants déjà gagnés à ce support sont en majorité des hommes, jeunes, Parisiens, cadres supérieurs ou étudiants, grands lecteurs déclarés avec près de 30 livres par an.
Pour l'essentiel d'entre eux, l'ordinateur (fixe, portable ou notebook) est jusqu'à maintenant le principal terminal de lecture numérique, les utilisateurs d'appareils dédiés ne représentant que 0.25 % de l'échantillon.
La lecture professionnelle est importante (40 % des répondants intéressés) et, pour les loisirs, les sites gratuits (Gallica, Gutenberg Archives, Feedbooks) constituent la première source d'approvisionnement, devant les sites payants (23 %) et les réseaux de partage (sites de piratage).
Un basculement moins rapide que la musiqueMême s'il paraît irréversible, le basculement de la lecture du papier vers le numérique sera moins rapide que l'évolution des modes de consommation constatée dans la musique et dépendra de trois facteurs estime Bruno Schmutz : l'accès à une offre abondante et si possible instantané, un terminal de lecture pratique et confortable, et un prix du livre numérique inférieur d'environ 40 % à celui du papier.
L'autre enquête, commandée le Département des études, de la prospective et des statistiques du ministère de la Culture, a été réalisée par l'Idate sur les marchés nord-américains et japonais du livre numérique, les plus développés actuellement (voir
le document téléchargeable en format pdf).
Si le Québec reste encore à l'écart de cette effervescence anglophone, il se caractérise par une politique publique volontariste autour d'un seul entrepôt numérique ouvert à tous les éditeurs.
Les Etats-Unis sont au contraire le lieu d'une concurrence agressive autour du prix, dominée pour le moment par Amazon, qui perturbe fortement
“des acteurs majeurs hantés par la destruction de valeur”, expliquent Vincent Bonneau et Marc Leiba, auteurs de ce travail.
Le Japon apparaissait comme le marché le plus prometteur et le plus équilibré, mais il se révèle d'un potentiel assez limité d'après les analyses de cette enquête, qui est allée au-delà des quelques phénomènes de mode et de l'emballement médiatique des débuts du numérique dans l'archipel.
S'il a bien a été porté jusqu'à maintenant par la lecture de manga sur mobile, le marché est resté circonscrit à des genres bien particuliers, sentimental, érotique et/ou pornographique, avec des séries anciennes et qui n'avaient pas dominé les ventes dans leur version papier.
Les éditeurs des séries les plus populaires se gardent pour le moment de les passer en numérique, et le phénomène des romans sur mobile (
keitsai shosetsu) est déjà retombé : la première société qui avait intensément exploité le genre a fait faillite, signale Vincent Bonneau.