C'est en face du Vésuve que Friedrich devint Nietzsche. Il fallait bien un volcan pour ce philosophe éruptif. C'est donc ce voyage à Sorrente auquel nous convie Paolo D'Iorio qui a participé à l'édition des ?uvres du maître dans la « Pléiade".
La grande force de ce livre, c'est d'abord son style, qui mêle récit, témoignages et explications. On est en 1876, Nietzsche a 32 ans. Il est malade. Il a besoin de se retrouver en paix avec lui-même. "Je n'ai pas assez de force pour le Nord." Ce sera donc le Sud ! Il est taraudé par des souffrances morales et physiques. Il engage donc cette parenthèse : rupture avec les "âmes balourdes" du Nord, rupture avec l'enseignement qui l'épuise, rupture avec le mythe wagnérien. Nietzsche s'ouvre à lui-même. Il observe le monde, la nature. L'histoire et la science s'installent dans son esprit déjà perturbé. C'est à Sorrente qu'il commence à écrire Humain, trop humain, dédié à Voltaire, que Paolo D'Iorio préfère intituler Choses humaines, trop humaines.
Sa chambre donne sur le Vésuve. L'air est parfumé par les orangers. "Nietzsche décide de devenir philosophe." Pour bien nous montrer ce qui se passe dans la tête de cet homme, D'Iorio fait appel aux personnages qui ont accompagné Nietzsche, à commencer par la comtesse Malwida von Meysenbug qui a tout organisé. Dans la villa Rubinacci - aujourd'hui l'hôtel Eden -, un peu à l'écart du village de pêcheurs, la petite colonie allemande s'active. Elle rêve d'une "école des éducateurs" qu'elle installe dans un couvent. Dans le chic hôtel Vittoria descendent Richard et Cosima Wagner. Nietzsche les rencontre une dernière fois. Avant la fuite.
Face aux "îles bienheureuses" d'Ainsi parlait Zarathoustra, Nietzsche a la révélation du Midi et de la pensée qui va avec. Le Sud lui fait du bien. Il se laisse vivre et laisse venir à lui les émotions et les pensées. Comme les dieux au soleil, il veut se laisser gagner par la vérité.
Nietzsche avait accepté Sorrente comme une cure. Sa maladie se développa, mais sa pensée aussi. Paolo D'Iorio nous donne tous les éléments de cette métamorphose. Il nous invite à un voyage. Intérieur celui-là.