Plusieurs associations d'auteurs se sont émues de la tribune du président de la Société des gens de lettres,
Christophe Hardy, publiée le 9 décembre
sur le site de Livres Hebdo. Le responsable y critique le Comité pluridisciplinaire des artistes-auteurs (CAAP) qui "
réclame que l’État impose à tout auteur qui voudrait participer à un salon, animer un atelier d’écriture, faire une demande de bourse, intervenir dans une classe pour un projet d’Education artistique et culturelle, de disposer d’un numéro de Siret et de se soumettre aux contraintes administratives qui en découlent". Cette demande "
aux allures de diktat" ne convient pas à "
la spécificité et la multiplicité de nos situations et de nos choix professionnels", écrit Christophe Hardy
"
La tribune du président de la SGDL est diffamatoire, s'offusque
Katerine Louineau, représentante du CAAP.
Le CAAP n’impose aucun diktat à qui que ce soit. Aucune réforme fiscale n’est en cours. Les conditions [de déclaration]
en traitements et salaires existent depuis la création [de ce régime fiscal]
en 1973, elles n’ont pas changé. Mais crier au loup quand il ne s’agit que de la loi, désigner un bouc émissaire et vouloir continuer de faire prendre des vessies pour des lanternes aux écrivains est tout au déshonneur de la SGDL et de son président. N’a-t-elle rien de mieux à faire que de s’attaquer ainsi à des artistes-auteurs ? Et pourquoi tant de haine ? Quels intérêts défend-t-elle ?"
Factures litigieuses
La réaction de la SGDL fait suite à la présentation, le 27 novembre, des conclusions de la mission fiscalité du ministère de la Culture sur les modalités de déclaration des revenus des artistes-auteurs, demandée par plusieurs associations d'auteurs. A cette occasion, la rue de Valois a rappelé que les revenus des artistes-auteurs doivent, par défaut, être déclarés au régime des bénéfices non commerciaux (BNC), accessible aux détenteurs d'un numéro de Siret. Une exception est néanmoins acceptée pour les droits d'auteur versés par les éditeurs, producteurs et organismes de gestion collective (EPO), qui peuvent être déclarés en traitements et salaires (TS).
D'après les directives du ministère, et "
dès lors que l'artiste-auteur doit établir une facture pour se faire payer", comme dans le cas des interventions en école ou en salon, "
il doit comme tous les citoyens français disposer d’un numéro de Siret", assure Katerine Louineau. "
Il n’y a aucune évolution des règles en vigueur [après cette réunion avec le ministère],
les voici simplement annoncées clairement. Nous ne plaidons pas pour une énorme zone grise pour nos professions, mais pour la clarté. La simplification passe avant tout par cesser la désinformation et les interprétations contradictoires pour savoir quel est le droit applicable", défend la présidente de la Ligue des auteurs professionnels,
Samantha Bailly, co-signataire, avec le CAAP,
d'un communiqué prenant acte des modalités fiscales s'appliquant aux auteurs.
Risque juridique
Selon le CAAP, les propos de Christophe Hardy reflètent la volonté de la SGDL de s'accrocher à de "
vieilles pratiques", "
illicites et complexes, telle la pratique de la note d'auteur, qui consiste à établir une facture avec ou sans TVA, sans numéro de Siret et incluant un précompte social". Pour certains auteurs qui effectuent des interventions ponctuelles en salon ou dans les écoles, ce mode de rémunération leur épargne la lourdeur administrative liée au statut d'indépendant, argue la SGDL. Un argument récusé par le CAAP, qui rappelle qu'il est "
très simple d'obtenir un numéro de Siret en 10 minutes en ligne et de pouvoir faire des factures en bonne et due forme".
"
Outre le risque juridique encouru, soit 75000 euros d’amende pour une personne physique en cas de manquement aux règles de facturation, il est beaucoup plus compliqué d’établir une note d’auteur qu’une facture normale, souligne Katerine Louineau.
Cela implique non seulement de connaitre les règles en matière de seuils et de taux de TVA mais aussi d’appliquer correctement les règles en matière d’assiette sociale et de taux pour chaque type de cotisation sociale."
Avec une quinzaine d'associations d'auteurs dont la Ligue des auteurs professionnels, la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse ou encore le Syndicat des écrivains de langue française, mais pas la SGDL, le CAAP demande la "
levée de toute insécurité juridique" pour les artistes-auteurs et qu'ils ne soient pas pénalisés pour avoir mal appliqué le droit existant en matière fiscale, particulièrement retors dans leur cas, au moins "
le temps d'informer les personnes concernées".