Une vidéo, dans laquelle Arnaud Lagardère se met en scène avec sa nouvelle compagne, Jade Forêt, dans un registre intime, relance le débat sur la motivation et les capacités de ce patron atypique, déjà décrié par le passé par certains actionnaires de son groupe.
Visionnée par plusieurs centaines de milliers d'internautes (dont 63 000 sur le site du journal Le Soir) en moins d'une semaine, la vidéo immortalise une séance photos pour la publication belge Le Soir Magazine. Ils se promettent un amour "sans limite", entrecoupant leurs confidences de baisers. Le mannequin se prête ensuite à des poses lascives dans les bras de son compagnon. "Cette vidéo n'est pas cultissime, mais kitschissime", a d'ailleurs admis Jade Forêt dans un courriel adressé vendredi soir à l'AFP.
Arnaud Lagardère a déjà défrayé, ces dernières années, la chronique avec sa vie privée. Depuis cette époque, il s'est entouré de communicants de l'agence Euro RSCG censés l'aider à contrôler son image.
L'exhibition de sa vie privée suscite au sein de son groupe et dans les milieux économiques des interrogations sur les capacités et la motivation de ce patron, passionné de tennis et de karting, qui traîne une réputation de dilettante.
"Arnaud dirige-t-il encore Lagardère ?", s'interrogeait lundi en Une le quotidien économique La Tribune.
"Cette vidéo est finalement peut-être un point positif (...) On va avoir un débat public", se réjouit l'analyste. "Il est tout de même directeur général : si cela l'intéresse moyennement, il vaudrait mieux prendre un peu de recul".
Les décisions récentes de céder le pôle international des magazines du groupe, dont les éditions hors France de son fleuron Elle, comme la volonté de céder ses participations minoritaires, notamment dans le capital de Canal+, ont été saluées par le marché.
Cette vidéo risque surtout de "démotiver" les salariés
Mais ces chantiers stratégiques sont l'oeuvre de l'actuel directeur financier Dominique d'Hinnin et les analystes font valoir qu'Arnaud Lagardère s'est plutôt illustré par des acquisitions coûteuses dans le sport qui ont jusqu'ici déçu.
L'investisseur Guy Wyser-Pratt, actionnaire à hauteur de 0,5%, avait en vain tenté en 2010 de faire réformer le statut qui fait d'Arnaud le seul maître à bord avec seulement 9,6% du capital.
Pour l'analyste, cette vidéo risque surtout de "démotiver" les salariés. "Ca montre qu'il se fiche de tout, les gens ont l'impression qu'il les dirige vers un suicide collectif", affirme l'ancien collaborateur. Selon La Tribune, "Arnaud Lagardère a aussi la malheureuse réputation de se désister au dernier moment de rendez-vous festifs mais professionnels, quitte à humilier ses cadres."
"Je crois que c'est un suicide économique", renchérit un professionnel de la communication fin connaisseur du groupe. Sous couvert d'anonymat, il y voit la "provocation" d'un "enfant gâté" qui, contrairement à son père "très respecté", "n'a jamais été adoubé par ses pairs".
Critiqué pour son management - trois des principaux dirigeants ont été brutalement remerciés récemment -, endetté personnellement à hauteur de 400 millions d'euros, Arnaud Lagardère aime jouer la provocation face à un "establishment" qui ne l'apprécie pas. Il devrait être nommé en juin 2012 à la présidence du conseil d'EADS (Airbus, Ariane, ...).
Lagardère possède Lagardère publishing (Hachette) et Lagardère services (Relay). Le groupe a affiché l'an dernier un chiffre d'affaires de 7,97 milliards d'euros, dont 3,58 pour Lagardère services et 2,17 milliards d'euros pour Lagardère publishing. Il emploie plus de 27 000 personnes dans le monde.