Participer à un atelier de cuisine marocaine, exercer son anglais dans un groupe de conversations, s'initier aux échecs ou faire du tricot ; autant d'activités qu'il n'est pas rare désormais de pratiquer dans sa bibliothèque ! Traditionnellement positionnés sur les missions culturelles et éducatives, les professionnels français sont aujourd'hui nombreux à revendiquer le rôle social de leurs établissements. Certaines bibliothèques proposent des activités et des services d'une grande diversité, comme l'ont montré les rencontres organisées les 22 et 23 novembre par la Bibliothèque publique d'information en partenariat avec la bibliothèque départementale du Val-d'Oise et l'association Cible 95. Souvent liées à un contexte local et par conséquent pas toutes duplicables, les expériences françaises et étrangères relatées ont suscité un vif intérêt parmi les quelque 120 participants. Par exemple, à Eragny-sur-Oise, l'accompagnement des usagers est appliqué au pied de la lettre : l'agent de la bibliothèque quitte son poste pour escorter jusqu'au service concerné l'usager venu poser une question sur la scolarité ou le logement. Un fonctionnement qui repose sur une volonté politique forte - "nous sommes du personnel municipal avant d'être du personnel de la bibliothèque", souligne l'intervenant -, facilité par la configuration du centre-ville, petit et piétonnier. Aus Etats-Unis, après le passage de l'ouragan Sandy, le réseau des bibliothèques du Queens, à New York, a mis en service un bibliobus équipé d'ordinateurs et de la WiFi, et a organisé la distribution de nourriture et de manteaux en lien avec la Croix-Rouge.
Quels professionnels pour quelles missions?
Très intéressantes, ces expériences posent néanmoins la question de la définition des missions et des compétences mises en oeuvre. «Les bibliothécaires sont de plus en plus conduits à exercer des métiers qui ne sont pas le leur et qu'ils feront forcément moins bien que des professionnels. Jusqu'où peut-on aller ?" s'inquiète un participant dans la salle. A la diversité des activités doit correspondre la diversité des profils, ont répondu les intervenants à l'unisson. "On a balayé l'idée que tous les personnels d'une bibliothèque devaient être des bibliothécaires", affirme Fred Gitner, de la bibliothèque du Queens, qui emploie aussi des assistants sociaux ou des spécialistes de la santé publique. A la bibliothèque-parc de Rocinha, la plus grande favela de Rio de Janeiro, seuls 6 des 45 membres de l'équipe sont bibliothécaires. Les autres viennent d'horizons divers, enseignant, psychologue, ou encore photographe. Une nécessité que Dominique Lahary a résumée en lançant : "Il ne faut pas assimiler la bibliothèque aux bibliothécaires."