5 JANVIER - BD Pays-Bas

Photo JOOST SWARTE/DENOËL GRAPHIC

Depuis L'art moderne (Humanoïdes associés, 1980), qui l'a fait découvrir, Futuropolis a publié dans les années 1980 une demi-douzaine de ses oeuvres dont Passi, Messa (4 tomes), Casterman sa réjouissante série Coton et Piston (3 tomes de 1995 à 1997), et Glénat un catalogue d'exposition (Leporello, 2010). Mais Joost Swarte, qui s'est un peu éloigné du 9e art depuis quinze ans, est resté injustement méconnu dans l'Hexagone.

Illustrateur, graphiste, designer, architecte et scénographe, l'artiste néerlandais né en 1947 est pourtant une figure clé de la BD contemporaine, qu'il a autant influencée qu'un Robert Crumb ou un Art Spiegelman. Marqué dans sa jeunesse par l'oeuvre d'Hergé, il est même, ainsi que le rappelle l'auteur américain Chris Ware dans sa préface à Total Swarte, l'inventeur du terme de "ligne claire" pour définir le style du maître de la BD belge comme le sien propre, qui en détourne le sens avec une impeccable élégance. Il a aussi conçu des timbres, des logos, des meubles et des objets, des vitraux (ceux du couvent Sainte-Cécile, siège de Glénat à Grenoble), un théâtre et même... des pâtisseries.

Total Swarte rassemble ses nouvelles graphiques réalisées entre 1972 et 2010. Elles frappent par le contraste entre la précision fascinante de la composition et du trait et l'exubérance, la fantaisie de l'univers de leur créateur. Joost Swarte porte sur la société un regard acide à travers des histoires loufoques. D'Hergé, il a gardé la rigueur du style et le dynamisme de la narration. Mais cet artiste underground charge, lui, sa ligne claire de dynamite pour décrire la face sombre de l'humanité.

Il suffit de lire les quelques pages d'En attendant le renfort, où un officier blanc mène une poignée de soldats noirs à un combat à la fois ludique et sans merci, pour saisir la distance avec l'univers policé de Tintin. Ou de suivre le principal héros récurrent de Swarte, l'ingénu Jopo de Pojo, dans Une chance sur mille, où un chef d'entreprise tente de faire enlever son fils afin de réduire son revenu imposable, pour comprendre qu'il n'entend pas se contenter d'amuser les enfants. The rubber paradise, qui donne vie à une théorie de capotes usagées, témoigne de son imagination débordante. Le père de Tintin a lui-même droit dans Les aventures d'Hergé il y a 50 ans à un hommage gentiment ironique.

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