Édito par Christine Ferrand, rédactrice en chef

Photo PHOTO OLIVIER DION

Il fait le job, comme disent les Américains. Et il ne rechigne pas à assurer la promotion de ses livres. Pourtant, François Bégaudeau ressent la même déception qu’à ses débuts. C’est bien beau d’aller gentiment d’une librairie à un festival, d’une émission de radio à une animation en bibliothèque, mais qu’en est-il de la littérature dans tout ça ? Dans La politesse, qu’il publie chez Verticales la semaine prochaine, l’auteur d’Entre les murs passe au Kärcher le monde des livres et surtout le service après-vente que les auteurs accomplissent avec plus ou moins de bonne volonté. Un parcours du combattant en décalage total avec le processus de la création littéraire et les aspirations d’un écrivain, comme il nous l’explique dans ce numéro.

Le monde des lettres n’est certes pas celui des chiffres. Pourtant, notre dernier indicateur mensuel Livres Hebdo/I+C apporte un contrepoint optimisme au sombre constat de l’auteur de La politesse. En janvier, les ventes de livres ont progressé de 5,5 %. Un score, très inhabituel à cette période de l’année, qu’on peut attribuer à un "effet Charlie". Confrontés aux tragiques événements de janvier, les Français ont retrouvé le chemin des librairies.

Depuis plusieurs semaines, nos listes des meilleures ventes montrent que les livres demeurent un recours face aux traumatismes collectifs. Non seulement les ouvrages d’hommages et ceux des dessinateurs de Charlie Hebdo s’arrachent - trois d’entre eux sont installés dans le Top 20, tous genres confondus -, mais cet engouement porte sur tout ce qui permet d’éclairer les événements et d’aider à comprendre le monde d’aujourd’hui. Cette semaine, c’est notamment le cas du Plaidoyer pour la fraternité d’Abdennour Bidar, de Place de la République : pour une spiritualité laïque d’Abd al Malik et du Piège Daech : l’Etat islamique ou Le retour de l’Histoire de Pierre-Jean Luizard. On peut aussi penser que le succès du recueil des textes sur la France de l’historienne et philosophe Mona Ozouf, De Révolution en République, tient en partie à ce questionnement.

A Arlon, en Belgique, la patronne de la librairie La Lettre écarlate, sur le point de tirer le rideau début janvier, a décidé qu’elle allait se battre pour garder sa librairie. Forte d’une certitude : "La culture est, avec l’enseignement, une des seules armes pour lutter contre la bêtise."

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