C'est la nuit. Dans son lit, un petit garçon appelle ses parents. Bizarre. D'habitude, ils répondent quand il a besoin d'eux. Mais là, nul signe. La peur s'installe, transformant tout, la peluche si familière le jour en objet effrayant, et la placide armoire en redoutable cachette à voleurs. N'osant bouger ni respirer, le garçonnet « fait le mort pour écouter plus fort ». Des bruits étranges, il en entend en pagaille autour de lui. A commencer par la maison qui craque comme un squelette de baleine. « C'est le bois qui joue, mais lui, ça ne l'amuse pas. » Il finit par s'enhardir, se lever et aller jusqu'à la chambre des parents. Surprise, elle est vide ! A la place de papa et maman, un gros chat indifférent à sa trouille se prélasse parmi les draps défaits. « Les chats sont ainsi, ils ne répondent jamais quand on a besoin d'eux. » Dans la cuisine en bas, le poisson rouge n'en sait pas davantage sur la troublante disparition. De toute façon, comme chacun sait, « les poissons rouges ne sont pas polis ».

Finalement il n'y avait pas lieu de s'inquiéter. En fait de disparition, les parents étaient tout simplement en train de s'embrasser dans le jardin derrière les géraniums. Dans cet adorable album, on salue la poésie du texte signé Marc Rius où les enfants « se jettent dans le bonheur des parents », où les « robinets pleurent », où il « pleut dans les yeux » et où « les cheveux de maman descendent en rivière sur l'oreiller ». Drôle, tendre et fantasque, l'illustration d'Antoine Robert épouse au plus près la réalité déformée par les peurs de l'enfant. Tantôt on le voit promener son oreille dans la salle à manger, tantôt on le surprend en train de dormir en position de fœtus au milieu d'un grand squelette de baleine. Que c'est beau !