Le régime particulier des artistes-auteurs devrait figurer parmi les rares particularités survivant dans le futur système universel des retraites. Pour ces cotisants, « qui sont affiliés au régime général mais ne sont redevables que de la part salariale, en l'absence d'employeur au titre de leurs activités », le rapport remis cet été par Jean-Paul Delevoye, haut commissaire à la réforme des retraites, indique que « la prise en charge de points se fera à hauteur de l'équivalent de la part patronale, dans la limite d'une fois le plafond de la sécurité sociale ».
Le point d'inquiétude essentiel des auteurs et des éditeurs n'aurait plus d'objet à la lecture de cette ferme préconisation, toutefois atténuée plus loin d'une réserve : « la concertation permettra de réévaluer la pertinence de certaines de ces dérogations ». Le rapport n'est que la première étape de cette vaste réforme qui doit être discutée au Parlement après les élections municipales, en mars 2020, d'où l'appel à la vigilance des représentants des auteurs.
Instauré en 1975, le régime des artistes-auteurs prévoit une cotisation réduite pour la part employeur, de 1,1 % au lieu de 10,45 %. « Ces réductions de taux n'ont aujourd'hui aucun impact sur les droits à retraite puisque ces derniers dépendent de l'assiette cotisée et non du taux applicable », rappelle le rapport Delevoye. Mais « le passage à une règle de calcul fondée sur le montant des cotisations versées conduira à révéler les effets de ces dérogations en ayant un impact négatif sur l'acquisition des droits à retraite ».
Sans prise en charge par l'Etat, il faudrait que les éditeurs acquittent sur les droits d'auteur un taux identique à celui qu'ils versent pour leurs salariés, ou que les auteurs se chargent de cette part, comme des travailleurs indépendants, ce qui ne manquerait pas de soulever des tensions. Toutes les structures culturelles versant des droits d'auteur (salons, médiathèques, galeries d'art, producteurs audiovisuels, théâtres, etc.) regroupées sous le nom de « diffuseurs » sont concernées, et elles ont parlé d'une même voix lors des consultations organisées par le haut commissariat. La prise en charge de cette part reviendrait à 260 millions d'euros, selon les informations communiquées aux représentants des auteurs et diffuseurs lors de ces échanges, qui doivent reprendre à la rentrée. Hervé Hugueny