Il reste huit mois pour adapter les sites de ventes de livres numériques - du côté des libraires - et la politique commerciale - du côté des éditeurs - à la réglementation européenne qui entrera en vigueur à propos de la TVA sur les services dématérialisés. Le 1er janvier prochain, son taux dépendra du pays de l’acheteur et non plus de celui du vendeur, comme aujourd’hui. Cette évolution de la réglementation est programmée depuis des années par l’Union européenne (UE), et ce n’est qu’un alignement sur les règles de vente de livres imprimés. Dans ce cas, les petites entreprises bénéficient toutefois d’une dérogation, et n’ont pas de déclaration particulière à remplir si leurs ventes vers l’UE ne dépassent pas un plafond variable par pays (de 10 000 à 100 000 euros) que n’atteint aucun libraire indépendant.
Dans le numérique, cette tolérance n’existe plus, et il faudra donc affronter la complexité des différents taux sur les ebooks, de 3 % au Luxembourg à 27 % en Hongrie (1), indique Stefaan Nemegeer, manager chez ePagine Benelux, et auteur d’une récente présentation à Londres lors de l’assemblée générale de la Fédération des libraires européens (EBF).
C’est néanmoins plus équitable que la situation actuelle, simple mais dont les grands bénéficiaires sont les revendeurs installés au Luxembourg : Amazon, Apple, Barnes & Noble, Kobo ne règlent que 3 % sur les ventes d’ebook dans l’UE, alors qu’un libraire en ligne français doit reverser 5,5 % à l’Etat, contre 21 % pour son homologue belge en ce qui concerne le bassin francophone. Les prix TTC étant en général identiques, le différentiel a un impact sur la marge du revendeur, du diffuseur-distributeur et de l’éditeur.
Sur le plan technique, il faudra pouvoir distinguer où se trouve le client consultant un site, pour savoir quel taux appliquer sur son achat éventuel. L’adresse IP de son terminal fournit une indication immédiate, moins fiable que celle de sa carte bancaire, connue seulement s’il y a transaction, souligne Françoise Dubruille, directrice de l’EBF. Sur le plan commercial, les éditeurs devront décider s’ils maintiennent comme aujourd’hui le même prix TTC, quelle que soit la TVA : ce serait simple mais coûteux en marge, souligne Denis Zwirn, P-DG de Numilog, gestionnaire de sites d’e-librairies et diffuseur-distributeur numérique d’Hachette, notamment. C’est la solution retenue par le distributeur-diffuseur Immatériel pour les éditeurs qu’il représente. Pour les indépendants, il y a aussi la question du bon sens économique : plus de 98 % des clients sont locaux, souligne Sophie Saint-Marc, déléguée générale de l’Alire. Hervé Hugueny
(1) Voir l’étude comparative de l’Ipa sur Livreshebdo.fr