Parmi les diverses publications qui vont sans doute venir célèbre le 50e anniversaire de la disparition de Roger Nimier - le 28 septembre 1962, à Garches, au volant de son "Aston Martin fatale", comme écrit Massin, ce petit livre mérite un sort privilégié. Intime, élégant, soigneusement conçu et maquetté - l'auteur demeure l'un des directeurs artistiques les plus inventifs de l'histoire de l'édition -, c'est l'hommage pudique de l'ami à l'ami, au collègue de bureau chez Gallimard où "Roger", mettant un temps entre parenthèses son oeuvre personnelle, travailla activement de 1957 à 1962.
Naturellement, le livre se présentant comme un petit album en couleurs, la part belle est faite aux documents, Massin se contentant, avec une modestie qui l'honore, de faire le lien entre les images, d'évoquer quelques souvenirs personnels, sans jamais exagérer sa propre importance dans la vie de son ami. Contrairement à d'aucuns, apparemment, puisque, non sans malice, il évoque "le petit monde des affabulateurs et des faux témoins" qui, post mortem, prétendent tous avoir vécu la dernière journée de Nimier sur cette terre !
Parmi la riche iconographie de ce Roger (Nimier), certaines photographies sont inédites, comme celle qui sert de frontispice : prise par Massin lui-même, on y voit Nimier souriant, posant assis sur l'aile d'une Rolls qui n'était pas sienne mais stationnait rue Sébastien-Bottin par hasard. A moins qu'elle n'ait appartenu à un autre auteur de la maison ! Il y a encore cette série de portraits en bras de chemise, prise dans son bureau. Les autres documents, dessins, caricatures, vraies fausses maquettes imaginées par le jeune homme facétieux (il est mort à l'âge de 37 ans), constituent des raretés.
Tout comme, en guise de finale, le très beau texte qu'Antoine Blondin, ami de toujours de Nimier, avait écrit pour les rabats de D'Artagnan amoureux, son dernier roman, paru posthume. Sur du papier d'écolier et au stylo à bille, sans repentirs ou presque, Blondin rend hommage à l'écrivain surdoué qui s'apprêtait à faire son grand come-back en littérature avec un livre épatant, enlevé. Juvénile pour l'éternité.
