A l'heure d'Internet, la mode est au grignotage. On picore du savoir, des idées et bien sûr des histoires. Le livre de Jean-Jacques Breton correspond parfaitement à cette pratique. L'auteur connaît bien son domaine. Il travaille au département Livres à la Réunion des musées nationaux. Sa fréquentation d'ouvrages très sérieux dans lesquels on trouve des pépites d'érudition lui a donné l'envie de quelque chose de très différent. Et le tout forme ces Petites histoires de l'histoire de l'art.
En quelques lignes ou en une page tout au plus, on apprend, on survole, on oublie certainement, mais on entre dans un univers quelquefois un peu trop confisqué par les spécialistes qui en ont fait une vaste demeure impressionnante et austère. Alors que c'est tout l'inverse quand on prend la peine d'aller fouiller dans les détails, ceux sur lesquels justement on ne s'attarde jamais.
Sur le principe des Miscellanées de Mr. Schott publiées chez Allia (200 000 exemplaires vendus depuis 2005), nous parcourons l'histoire de l'art à sauts et à gambades en suivant quelques thèmes : chefs-d'oeuvre, finances, critique, modèles, mort.
On passe du "syndrome de Stendhal", qui saisit les Japonais éprouvés par la visite de trop de musées en peu de temps à Soutine, qui laissait pourrir dans son appartement des carcasses de boeuf à force de retravailler sur son sujet saignant. On s'émeut devant la modestie de Chagall, on surprend Malraux qui fait retailler à Marseille des pierres découpées à Angkor et on apprend qu'un escroc a réussi à fourguer un faux Vermeer à Goering.
Sans parler des anecdotes piquantes qui en disent long sur les personnalités de ceux qui ont joué un rôle dans cette histoire depuis l'Antiquité : une lettre de Léonard de Vinci en forme de CV, le voleur de La Joconde Vincenzo Perrugia, qui finit par acheter en Haute-Savoie un magasin de peinture, ou Picasso aussi radin que conscient de son génie qui, après avoir fait un dessin sur la nappe en papier d'un restaurant à Vallauris en guise d'addition, répond au patron qui lui demande s'il ne pourrait pas le signer : "Je paye le repas, je n'achète pas l'établissement..."