La « rétropie » s'oppose à l'utopie en ce sens qu'elle regarde en arrière plutôt qu'en avant. C'est en somme l'utopie du passé, le « c'était mieux avant ». Dans cet essai publié quelques mois avant sa disparition, Zygmunt Bauman (1925-2017) constate que le passé n'est pas plus stable que l'avenir. « Le chemin vers l'avenir est devenu synonyme de corruption et de dégénérescence. Mais le chemin du retour vers le passé permettra-t-il pour autant de remédier aux dommages causés dans le présent au nom du futur ? » Le « rétropiste » n'envisage plus une société meilleure, mais tente d'améliorer sa propre situation dans un monde impossible à corriger en regardant dans le rétroviseur.

Zygmunt Bauman est l'inventeur d'un concept : la société liquide. Par cette expression, le philosophe et sociologue d'origine polonaise explique la précarisation de nos modes de vie. De solides, nos liens sont devenus liquides, insaisissables, atomisés, avec le consumérisme pour seul horizon. Le problème, c'est que nous croyons plus que nous espérons. Court, dense, inattendu, voilà un livre qui s'impose comme le testament d'un grand intellectuel européen. Et qui surtout incite à réfléchir à l'heure des poussées nationalistes.