Mise sur pied à la rentrée, la mission Culture acte 2 confiée à Pierre Lescure a démarré presque immédiatement son marathon de quelque 80 auditions de représentants des acteurs de tous les secteurs de la production et de la diffusion des oeuvres culturelles, qu'elles soient audiovisuelles, musicales ou écrites. Plus ou moins conçue au départ pour régler son compte à la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), perçue par la nouvelle majorité comme un outil mesquinement répressif, cette mission a élargi son ambition aux perspectives de ce que pourrait être le devenir de l'exception culturelle si chère à la France, adaptée aux forces de l'économie numérique qui risquent de l'écraser. Pierre Lescure, entouré de membres de son équipe, a reçu à ce jour les représentants des bibliothèques, des libraires et des éditeurs, via leurs associations ou syndicats : Interassociation archives bibliothèques documentation (IABD), Syndicat de la librairie français (SLF), Syndicat national de l'édition (SNE).
Le rapport de la mission est attendu pour fin mars et s'attachera à trouver un équilibre entre les nouvelles formes de l'accès du public aux oeuvres, qui pourra passer par des adaptations du droit d'auteur, sans mettre en péril le financement de la création. Le livre ne devrait donc pas être traité en tant que tel, dans une succession d'analyses sectorielles, mais avec ses particularités au sein de ce cadre général. Les bibliothécaires (Michel Fauchié) ont bien souligné que le numérique devrait se traduire par une amélioration de leur mission de mise à disposition de contenus, et non par une régression par rapport au prêt papier en raison des verrous technologiques ou d'une tarification inflationniste. Le SNE (Vincent Montagne) a insisté sur le pragmatisme et l'adaptation des éditeurs, qui ne refusent en rien les nouvelles technologies, à condition que la règle de base soit respectée : pas de destruction de valeur, dans ce secteur qui est le premier des industries culturelles. Les libraires (Matthieu de Montchalin) se sont aussi attachés à montrer qu'ils ne sont pas dans une résistance passéiste et sont capables de s'adapter à la diffusion de livres numériques où ils ont toute leur place : 250 d'entre elles sur 3 000 en proposent déjà à leurs clients, alors que le marché est encore minime. Mais les stratégies prédatrices des nouveaux venus doivent être contenues, pour que ce maillage d'indépendants puisse continuer à assurer la visibilité exceptionnelle nécessaire à la diversité éditoriale. Ils ont également insisté sur ce que représente la librairie en termes d'emplois (14 000, sur 20 000 au total dans la vente de livres) et sur le potentiel de destruction que représente la distribution via Internet.