Le premier recueil de nouvelles de Thom Jones, Le pugiliste au repos (Albin Michel, 2005, repris en 10/18), était un véritable uppercut. Maître de la tourmente et du mal-être, l'Américain mettait en scène des marines et des boxeurs avec une même justesse. On avait retrouvé intacte sa force de frappe dans Coup de froid (Albin Michel, 2007), dont les protagonistes avaient eux aussi tous du plomb dans l'aile. Sonny Liston était mon ami, le troisième de ses livres à nous parvenir, maintient largement le niveau.
Kid Dynatime s'ennuie à l'église, il n'y va que pour contenter sa grand-mère. Le héros de la nouvelle qui donne son titre au livre est un jeune homme bien fait de sa personne, au nez redessiné. Timide et encore puceau bien qu'ayant une ravissante petite amie aux yeux verts, l'adolescent habite à Aurora, dans l'Illinois. Aux études, Kid préfère la boxe. Avec ses 67 kilos, il tire dans les mi-moyens.
Au tournoi de l'année dernière, le pauvre s'est fait étendre par ce champion de Louis Reine. Pour prendre sa revanche, il travaille son jeu de jambes. "Je suis en forme. Dès qu'on aura échangé quelques coups, je saurai quoi faire", lâche-t-il à son oncle Mickey... Plus loin, on croise un soldat du 1er bataillon de marines qui profite d'une permission pour aller visiter une boîte de strip-tease à Tijuana. Au programme des réjouissances : rhum, gin, joint, bagarre générale.
Le gaillard se réveillera à Pasadena sans savoir comment il a pu y parvenir. Avec un tatouage sur le biceps, mais sans "morbacs ou une bléno, voire les deux", comme quelques-uns de ses copains de beuverie. Des soldats, on en retrouve au Cambodge, où le Viêt-cong se déchaîne. Dans la jungle vietnamienne, enfermés dans des cages en bambou... Il n'y a jamais de gras ni de pathos chez Thom Jones, dont les histoires crues frappent par leur réalisme et leur économie.