Est-ce qu’un écrivain est aussi une sorte de VRP de ses mots ? Ma rentrée littéraire s’est très bien passée, et je suis heureux du succès de La délicatesse . Pour une fois, je ne commence pas un blog en m’auto-flagellant, n’allez pas tout de suite faire courir la rumeur poussive que j’ai pris la grosse tête. J’ai arpenté les librairies en buvant du rouge, et pendant la tournée du Goncourt des Lycéens, j’ai carburé au Coca Light. Je m’adapte, je suis un auteur qu’on déplace facilement. Je ne suis pas du genre à avoir des excédents de bagage, je suis ponctuel, poli, et il m’arrive même que des femmes rêvent de moi pour leur fille : j’ai une vraie tête de gendre. Il m’est arrivé d’être drôle, et parfois même profond ; certes, j’ai répété un peu souvent les mêmes choses, mais ça, c’est le propre d’une promotion. J’ai été sur toutes les listes des grands prix littéraires, mais je n’en ai eu aucun. Mince. Parfois, j’ai fini tout près, comme pour le Goncourt des Lycéens. Une sorte de Poulidor de la rentrée (Alors là, c’est un signe poulidorien : au moment où j’écris ce blog, j’apprends que j’ai fini deuxième de ma présélection pour le grand prix des lectrices de ELLE !). Je ne m’avoue pas vaincu pour autant, ah ah !   Les saisons passent, et les rentrées littéraires aussi. Elles cèdent à la nouveauté. Janvier, une autre rentrée. Déferlement de pages. Discrètement, je m’y place encore. Je publie une petite nouvelle aux Editions du Moteur. Une nouvelle maison d’édition qui publie des nouvelles destinées à être adaptées au cinéma. Air du temps. On retrouvera, entre autres, des textes de Serge Joncour ou Yasmina Khadra. J’inaugure la collection avec Bernard , l’histoire d’un homme de 50 ans (qui s’appelle Bernard (d’où le titre (oh oh, comme je suis malin)))… et qui va retourner vivre chez ses parents. Le prénom des personnages est toujours primordial. Après, le livre découle toujours tout seul. Pour Bernard , il ne faut pas beaucoup d’imagination pour savoir que ça va mal se passer pour lui. Quant à La délicatesse c’est un roman très Nathalie. Un prénom qui me plonge dans les années 70, une forme de douceur surannée, une mélancolie de bonne humeur. Premier livre lu de la rentrée, celui de Nicolas Rey. À son image désinvolte, c’est un livre qui peut paraître foutraque, un enchaînement de petits textes, et qui pourtant, au bout du compte, forme un tout d’une immense cohérence. Un tout d’une densité émouvante rare. Certaines pages sont fabuleuses de beauté, de tendresse, de douleur. C’est une déclaration d’amour à la mère de son enfant, Marion, même si «  elle le méprise depuis tant de siècles  », à la vie, aux tentatives de s’accrocher aux brèches de la beauté, aussi infimes soient-elles, quand il ne reste plus rien. C’est un livre à l’humour désespéré (hi hi), avec cette superbe phrase qui donne le titre : Je m’appelle Nicolas Rey, et j’ai eu léger passage à vide de 11 à 35 ans.   C’est un livre utile : on y apprend qu’il faut toujours regarder la couleur du canapé quand on entre dans une pièce. C’est un livre que j’ai envie de relire, auquel je pense encore alors qu’il neige et que je ne vois plus rien.
15.10 2013

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