Au 21 de la rue aux Ours, à Rouen, une nouvelle devanture d’un rose éclatant accroche le regard. Elle appartient à L’encre du cœur, librairie spécialisée dans la romance qui a ouvert ses portes le 20 avril. Derrière le projet, Edith Bravard, 24 ans, diplômée de sciences politiques en 2023 : « Grande lectrice de romance, j’étais frustrée de ne pas trouver de livres qui me convenaient dans les enseignes généralistes, explique-t-elle à Livres hebdo. Il n’y avait que les autrices les plus connues, et j’avais déjà tout lu. Il me manquait aussi une communauté, avec des évènements, des rencontres, etc. »
Un vide accentué par le fait de ne pas vivre dans la capitale. « Nous sommes trop près de Paris pour organiser des choses qui se passent directement chez nous. Des initiatives, comme des salons sur la romance, se mettent en place mais à échelle réduite. À part à la Fnac de Caen, il est rare de rencontrer des autrices dans le secteur » déclare la Normande. D’où l’engouement des lectrices pour L’encre du cœur : outre une ouverture chargée en public, la librairie a affiché complet en deux jours (30 places) pour sa soirée du 17 mai consacrée à la sortie de la nouvelle saison de Bridgerton. Elle cumule aussi 225 inscrites dans ses deux clubs de lecture et a déjà embauché des stagiaires jusqu’au mois de septembre.
Une « libraire 2.0 »
En reconvertissant son compte de lectrice sur Tiktok (qui dénombre 3352 abonnés) en compte dédié à la librairie, Edith Bavard a été relayée par nombre d’autrices de romance avec qui elle est en contact, à l’instar de Liv Stone et Eugénie Dielens, contournant ainsi le passage normalement obligé par les maisons d’édition pour l’organisation de rencontres. Elle s’intéresse également aux influenceurs livres : ce samedi 27 avril, la libraire prévoit une journée #Booktok avec la venue de deux de ses représentants, les tiktokeurs Polat et Nelcy. « D’habitude, ça ne se fait pas, on privilégie les écrivains. Mais il y a bel et bien une volonté des lectrices de rencontrer leurs influenceurs préférés, surtout que c’est parfois par ce biais qu’elles se sont mises à lire de la romance. »
La surface de vente, à hauteur de 85 m², est divisée en trois pièces : l’accueil, un endroit spécial pour la romantasy et une salle de goodies conçus par des créatrices européennes. Dans les rayons, entre 2 000 et 2 500 titres, dont 70% de romance pure. Edith Bravard compte aussi créer une section young adult et un côté livres d’occasion. Autre nouveauté : deux bibliothèques dédiées aux livres en VO. « À part les sagas comme Harry Potter, il y en a très peu dans les librairies de Rouen. Les lectrices sont donc obligées de passer par Amazon, parce qu’elles sont impatientes de lire la suite des romans pas encore traduits », confie-t-elle. Un démarrage sur les chapeaux de roue, donc, pour celle qui se définit comme une « libraire 2.0 ».
