6 février > nouvelles France

Stéphane Hoffmann a toujours été un romancier piquant, il l’a prouvé avec Des filles qui dansent (Albin Michel, 2007) ou avec Les autos tamponneuses (Albin Michel, 2011, repris au Livre de poche). Le conteur que l’on découvre dans les trois nouvelles qui composent Le méchant prince s’avère tout aussi réjouissant.

Stéphane Hoffmann - Photo DAVID IGNASZEWSKI/KOBOY/ALBIN MICHEL

Suivons d’abord le couple formé par Jean, un avocat, et Lili, une femme "délicieuse" qui dirige une entreprise de travaux publics. Tous deux aiment à randonner sur les sentiers des Alpes. Un jour, le hasard les amène au bord d’un lac. Chez un aubergiste qui les requinque d’un vin chaud et n’est autre que le héros d’une Lili fascinée par les têtes couronnées. Car l’aubergiste en question est le prince Riourik de Transmontanie, "petit, antique et puissant royaume proche de l’Europe centrale".

A Jean et Lili, Riourik raconte ce qui l’a conduit à changer de vie, à abdiquer. Et revient sur ses jeunes années, lorsqu’il était prince héritier. Fils du défunt roi Théodule XII et de la S.M. la reine Cunegonda III, Riourik s’en était alors allé à Londres, bardé de ses décorations, au mariage de S.M. le roi Loulou où il devait servir de chevalier servant à sa mère.

Le lecteur fait ensuite connaissance avec le padre Gennaro Scapuletti qui vient d’être nommé dans un petit village montagnard de la vallée d’Aoste. Lors de son premier prêche, le jeune vicaire évoque la parabole des talents et la vie éternelle. Jadis, il a mené une tout autre existence. Gennaro a été chanteur et footballeur, présentateur télé, gérant d’une boîte de nuit ou sculpteur. Avant de fuir les plaisirs de Bologne et une fiancée réputée pour son tempérament "volcanique"

Enfin, nous voici propulsés dans une France, fille aînée de l’Eglise, où le Bon Dieu s’est mis en tête de tester ses réformes. Dans tout le pays, plus personne ne veut concourir à quoi que ce soit. Plus personne n’a envie d’être président de la République, plombier ou même d’acheter un aspirateur. Les hommes, en revanche, ressentent un irrépressible besoin entre midi et 13 heures et ont la particularité de mourir à 100 ans, 1 jour et 1 heure pile !

Avec verve, humour et style, Stéphane Hoffmann parle de liberté et d’indépendance, des chemins de traverse qu’il faut parfois emprunter pour s’accomplir. Il se montre ici un moraliste doublé d’un satiriste capable d’épingler les travers de l’homme. "Ce grand nigaud qui pense être né pour servir à quelque chose et léguer un nom à l’Histoire (wouarf, quel couillon !) alors qu’on lui demande juste de laisser la place dans l’état de propreté où il l’a trouvée en arrivant !"

Alexandre Fillon

Les dernières
actualités