Il est intéressant de rapprocher deux évènements a priori sans lien. Les dernières élections et le salon du livre de jeunesse de Montreuil. L’abstention a atteint un taux record dans certaines villes de banlieue, notamment dans les banlieues parisiennes, à Montreuil (58%), à Clichy-sous-Bois (71,4%), à Sarcelles (71,9%), à Villeneuve-la-Garenne (69%). Explication : le sentiment de l’abandon, de la mise à l’écart. La prise de conscience de ce que la société toute entière ne se préoccupe des banlieues que lorsqu’elles sont en feu. Et qu’apprend-on à la veille des élections ? Que l e Conseil général couperait la subvention du centre de ressources du département si joliment dénommé Livres au trésor et qui se consacre au livre de jeunesse. Et que, non content de cette « riche » idée (pardon pour le jeu de mots), il envisagerait de réduire celle du Salon de Montreuil ( d’1 à 1,2 million d’euros en faisant appel aux autres partenaires : mais que diable, lesquels ?) . Le salon, parait-il, n’est pas menacé. Son succès lui assure un fragile équilibre économique. Mais il avait réussi à essaimer dans le département son action de sensibilisation au livre et à la lecture ; ce sont donc des centaines d’initiatives à caractère littéraire (expositions, malles de livres, lectures, notamment dans les centres sociaux, rencontres d’auteurs, ateliers d’illustrateurs, formations….) qui rythment la vie en Seine-Saint-Denis, ainsi que des actions en direction des écoles, qui se trouvent en péril . Bien sûr, l’argent public est devenu plus rare, mais tout de même, quelle indécence ! On assèche l’activité d’un centre de ressources d’un trait de plume si vite tiré qu’on s’en est à peine aperçu ! On coupe dans les budgets d’un évènement destiné au livre de jeunesse, dans un département qui brille par sa jeunesse ! Je ne puis m’empêcher de rapprocher ces deux évènements d’un constat récent issu d’une étude du MOTIF sur la librairie en Ile-de-France. Elle montrait que Paris concentre 739 points de vente de livres, dont 697 librairies, et le département de Seine-Saint-Denis 64 points de vente, dont 42 librairies. Soit une librairie pour environ 4 000 habitants à Paris, et une pour environ 46 000 habitants en Seine-Saint-Denis ( Livres Hebdo , 22 juin 2009). Le service culturel du département a choisi de sacrifier les livres ; et il le fait en s’attaquant à deux fleurons de la vie culturelle dans le département. Là où le marché est défaillant, la puissance publique est doublement fautive. Vote du budget le 8 avril.