18 février > Essai France

Que préserve-t-on d’une œuvre d’art lorsqu’on la restaure ? La question peut paraître étrange, mais elle nous enjoint de nous interroger sur la notion même de l’art. Pour bien faire comprendre son propos, Jean-Pierre Cometti donne plusieurs exemples comme un collage de Picasso, la "Brillo Box" de Warhol ou un ready-made de Duchamp. Dans tous ces cas, ce que l’on conserve et ce que l’on restaure est de nature différente.

Grand spécialiste de Musil et de Wittgenstein, Jean-Pierre Cometti, décédé le 4 janvier dernier à 71 ans, nous invite à faire le point sur les évolutions récentes en matière de conservation et de restauration des œuvres d’art. Inspiré par les travaux de Walter Benjamin et son étude sur L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique (1936), il aborde les notions de l’extension des biens culturels, l’internationalisation du marché de l’art, le rôle de plus en plus important de la finance, la question du faux, le rapport à la mémoire et la fonction des musées.

Parallèlement, Folio "Essais" accueille un autre travail inédit de Jean-Pierre Cometti sur la philosophie politique de John Dewey (1859-1952), La démocratie radicale (350 p., 8,20 euros). Celui-ci avait notamment envisagé l’œuvre d’art comme une expérience. Dans cette optique, la notion de conservation et de restauration devient plus complexe encore. Paradoxale même. Elle implique la relation que nous avons avec l’œuvre, donc l’émotion que l’on éprouve. Et cela est difficile à transmettre.

Dans cet essai posthume dense et structuré, Jean-Pierre Cometti aborde des sujets fondamentaux qui touchent à l’esthétique et dont nous n’avons pas fini de parler. Parce qu’ils touchent le propre de l’homme et son rapport au temps. L. L.

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