Certains diront que l’événement du jour est la sortie des livres consacrés à Carla Bruni. Je tiens à protester avec la dernière énergie. Quand je dis dernière, c’est au sens propre, car, d’énergie, il ne m’en reste plus guère : je viens de passer une vingtaine d’heures, nuit comprise (si le titre de ce blog vous paraissait étrange, il vous deviendrait maintenant transparent en voyant ma tête), à lire Les Bienveillantes , dans la réédition de poche qui arrive aujourd’hui en librairie. Et qui me semble, en effet, le véritable événement du jour. Plus épais de 300 pages que Belle du Seigneur dans la même collection Folio, le roman de Jonathan Littell avait été, inutile de le rappeler, la grande surprise de la rentrée littéraire 2006 : un premier roman d’un inconnu (même si son père était déjà l’auteur de best-sellers) qui refusait de passer à la télévision, 900 pages, 25 euros, cela avait tout pour décourager les lecteurs. Qui en firent pourtant un succès, encouragé par l’abondance de la critique et encourageant les Académies française et Goncourt à lui donner leurs prix de saison. Je n’avais pas lu ce livre à sa parution. Il était resté longtemps sur ma table de chevet, il m’arrivait de le prendre pour dix ou vingt pages mais, la rentrée littéraire, vous savez ce que c’est : beaucoup de lectures urgentes pour écrire des articles, et pas beaucoup de temps pour le reste. Comme je ne m’occupais pas des Bienveillantes dans mon journal, et comprenant que je n’arriverais jamais au bout, j’avais fini par le donner à un professeur de lettres qui bavait chaque fois que je lui en parlais. Grâce au poche, je viens de me « rattraper ». Je ne mourrai pas idiot. Comme, je suppose, tant d’autres lecteurs qui avaient, comme moi mais peut-être pour d’autres raisons, renoncé à ce livre à l’époque de sa parution et qui ont maintenant une nouvelle occasion de s’y mettre. Dans la même rentrée 2006, Gallimard avait également publié un roman qui, sans provoquer un pareil engouement immédiat, sans recevoir de prix (sinon celui des Libraires l’année suivante), a fait une carrière impressionnante : L’élégance du hérisson , de Muriel Barbery. Si l’on s’en tient à une pure logique de délai entre la première édition et la publication en poche, on ne comprend pas pourquoi ce titre ne paraît pas également en Folio, et encore moins pourquoi il n’est pas encore annoncé dans les prochains mois. C’est tout bête, il suffit de jeter un œil sur les listes des meilleures ventes pour se ranger à l’avis des stratèges commerciaux de la maison : huitième meilleure vente dans l’absolu, troisième dans la catégorie romans d’après le dernier classement disponible sur ce site, L’élégance du hérisson continue à faire les beaux jours de son éditeur et de son auteur. Il serait stupide de le faire passer maintenant au format de poche, avant que le succès s’essouffle. J’espère que ça arrivera malgré tout un jour et, même, je vous le demande : cessez donc d’acheter le livre de Muriel Barbery ! Cela poussera Gallimard à le publier en Folio et… je pourrai le lire aussi. Jonathan Littell. Les Bienveillantes . Folio, n° 4685, 1.408 pages, 12 €
15.10 2013

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