Depuis Olivier Bourdeaut et son En attendant Bojangles (2016), l'un des beaux succès de librairie de ces dernières années, il est plutôt recommandé de porter une attention toute particulière aux primo-romanciers ou romancières que peuvent publier les toujours modestes, mais désormais bien installées dans le paysage littéraire, éditions Finitude. Et cette attention a toutes les chances d'être à nouveau récompensée, si l'on en croit les préachats en poche (J'ai Lu en a acheté les droits avant même publication) et l'intérêt des scouts étrangers, à propos du Parfum des cendres, le premier roman de la jeune étudiante en anthropologie Marie Mangez, qui pourrait bien faire l'événement en cette prochaine rentrée littéraire.
Ce livre qui pourrait paraître parfaitement glauque parvient pourtant à ne l'être jamais, se situant résolument a contrario de son sujet, du côté sinon de la joie, au moins d'une certaine allégresse. Le héros du récit, triste et à la pâle figure, Sylvain Bragonard, 37 ans, est thanatopracteur depuis plus de treize ans. Si c'était possible, il parlerait encore moins et aurait moins d'interactions sociales qu'aucun des corps auprès desquels il doit pratiquer « son art »... Un taiseux donc, un triste surtout, qui se destinait au métier de nez pour la parfumerie et dont on réalisera vite qu'une tragédie dans sa jeunesse a brisé à jamais cette ambition. Qui le comprend en premier ? Une jeune femme, Alice, brillante étudiante, qui prépare justement une thèse sur la thanatopraxie. Peut-être parce qu'elle est pleine de vie, d'envies, de musiques, de bonheurs à venir, elle est l'exact contraire de son sujet d'études et a fortiori, de Sylvain, qu'elle va suivre dans ses aventures professionnelles pendant quelques semaines, se présentant comme son assistante. Au début, les deux ne vont partager que les trajets, le silence et les bonbons à la menthe de l'homme. Peu à peu, tout doucement, va naître tout de même l'ébauche d'un dialogue, celui d'une relation.
On laissera le soin au lecteur de découvrir non pas où Marie Mangez veut en venir, mais où elle nous emmène. Qu'il suffise d'écrire ici la grâce avec laquelle elle parcourt ce chemin. Et le talent qu'elle a pour nous entraîner sur des pistes sans issue, mais pas sans beauté. Les choses de la vie (et de la mort) sont ce qu'elles sont ici, si joliment irrémédiables.
Le parfum des cendres
Finitude
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 18,50 € ; 240 p.
ISBN: 9782363391506