ÉDITO par Fabrice Piault, rédacteur en chef adjoint

Photo OLIVIER DION

Une décision annoncée il y a dix jours par HarperCollins est curieusement passée presque inaperçue. Prenant acte de la simplification et de la mondialisation de la diffusion des textes entraînées par le numérique, l'un des premiers groupes américains de littérature générale, et le vingtième éditeur mondial, entend aujourd'hui commercialiser via une nouvelle structure, HarperCollins 360, l'ensemble de son catalogue à l'échelle planétaire, sans passer par ses filiales nationales ou des éditeurs tiers. Cette stratégie redoutée de longue date dans les "petits" pays ne doit pour l'instant s'appliquer qu'aux marchés de langue anglaise, et elle s'entend sous réserve de la détention des droits territoriaux ad hoc. Mais précisément, en impliquant que HarperCollins s'attachera désormais à contrôler l'ensemble desdits droits, elle trace une perspective qui pourrait modifier à terme bien des équilibres de l'édition internationale. Et accélérer, si l'on n'y prend garde, la déstabilisation de la librairie au profit des grands opérateurs numériques transnationaux, pour l'instant essentiellement américains.

C'est dire l'enjeu, en dépit des différences parfois abyssales des contextes et des pratiques d'un pays à l'autre, d'une approche globale des métiers du livre. Lorsque nous avons publié en 2007 notre premier Classement Livres Hebdo de l'édition mondiale, il a été accueilli comme une curiosité, voire une lubie de journalistes. A sa sixième année d'existence, repris par nos confrères de Publishers Weekly (Etats-Unis), Buchreport (Allemagne), The Bookseller (Royaume-Uni) et PublishNews Brazil (Brésil), il s'impose comme un outil de travail.

Le Classement Livres Hebdo de l'édition mondiale ne permet pas seulement de suivre la trajectoire des principaux acteurs de l'industrie. Il fait apparaître les tendances et les problématiques de fond qui la traversent : l'émergence de nouvelles dialectiques entre contenus et services dans l'édition professionnelle et d'éducation, les dynamiques et les mutations structurelles induites par la révolution numérique, les conditions d'intégration des BRIICS (Brésil, Russie, Inde, Indonésie, Chine et Afrique du Sud) dans l'édition mondiale... Des mouvements qu'il vaut mieux saisir à temps. Ce n'est pas un hasard si la Commission européenne va chercher aux Etats-Unis les arguments pour mettre à bas les contrats de mandat régulant les prix des livres numériques pour garantir la diversité de l'offre éditoriale et des canaux de diffusion du livre.

07.10 2014

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