21 août > roman France

Elisabeth Filhol avait déjà impressionné avec La centrale (P.O.L, 2010, repris chez Folio). Un premier roman qui lui a valu le prix France Culture-Télérama et qui a inspiré un film à Rebecca Zlotowski, Grand central, avec Léa Seydoux et Tahar Rahim. Dans Bois II, la voici qui met à nouveau en scène des hommes, des femmes et des machines. Qui parle encore du monde du travail où les êtres humains sont parfois de simples rouages.

Nous sommes en 2007, dans une zone industrielle. Un site dans le nord-ouest de la France. La voix que l’on écoute fait partie d’un groupe d’une dizaine de salariés de la Stecma qui s’est donné rendez-vous à l’aube. Le collectif uni par la menace et faisant front commun compte des ouvriers, des administratifs, des agents de maîtrise. Christophe, Eric, Gaëlle, Mathieu, Jean-Marc côtoient la narratrice, qui a embauché là en 1984. Tous attendent le patron qui doit franchir le portail avec son 4×4 Mercedes noir aux vitres teintées, comme il le fait deux ou trois fois par mois.

Bois II est une mine de fer promise à la casse, à la liquidation. Elle a été dans le giron de Pechiney, puis dans celui d’Alcan. Mais il faut aujourd’hui restructurer le groupe, se débarrasser des sociétés les moins rentables. On parle de l’arrêt de l’activité par liquidation ou d’une cession de l’entreprise. Les salariés savent qu’au-dessus d’eux il est question d’OPA, de business plan, de fusion, de rentabilité en fin d’exercice. Les machines ne tournent plus, des engins de chantiers s’activent à démolir les bâtiments de l’ancienne usine Cegedur-Pechiney. Un groupe d’action bloque les expéditions, les palettes de produits finis ne quittent plus les entrepôts. Pas question de se laisser faire, d’abdiquer. D’oublier un monde minier avec son histoire, ses héros et ses figurants.

Un monde qu’Elisabeth Filhol donne à voir avec précision, sans hausser le ton, sans juger. Digne successeur de La centrale, Bois II prouve le talent de l’écrivaine à bâtir une fiction qui associe parfaitement réalisme et romanesque. Alexandre Fillon

04.07 2014

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