Essai/France 5 mars Evelyne Grossman

Page Blanche

Evelyne Grossman - Photo Cyril Grossman/Minuit

Page Blanche

Evelyne Grossman s'intéresse aux pannes d'inspiration chez quelques auteurs du XXe siècle.

Par Laurent Lemire
Créé le 20.02.2020 à 21h00 ,
Mis à jour le 21.02.2020 à 00h00

Pierre Guyotat est mort le 7 février 2020 à 80 ans. Dans Coma (prix décembre 2006), il évoquait un passage douloureux au printemps 1982, son effondrement psychique, l'impossibilité d'écrire, de dire « je ». Cette crise de la créativité qui se mue en créativité de la crise est le sujet du bel essai d'Evelyne Grossman (Université Paris-Diderot). Avec justesse, cette philosophe pointe dans quelques œuvres les moments où tout semble basculer, s'arrêter pour finalement recommencer. Huguenin, Calaferte, Joë Bousquet, Beckett et Artaud, dont elle édite les œuvres chez Gallimard, voisinent avec Blanchot, Deleuze, Nietzsche et Foucault. Pourtant, Evelyne Grossman ne théorise pas à l'excès sur une pensée de la crise. Elle décrit ce symptôme qui touche différemment chaque auteur. Elle montre comment les textes se font et se défont en passant par le silence. Sa lecture de ces passages à vide se nourrit de psychanalyse, mais elle demeure prudente sur la relation qui pourrait être établie entre crise et créativité pour s'intéresser à l'inspiration qui renaît. Avec cette gourmandise qui donne envie de se saisir des ouvrages qu'elle cite, elle explore une pathologie finalement bien connue que les spécialistes nomment leucosélophobie, c'est-à-dire la peur de la page blanche. Laurent Lemire

Evelyne Grossman
La créativité de la crise
Minuit
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 15 euros , 128 p.
ISBN: 9782707346124

Les dernières
actualités