16 JANVIER - ROMAN France

Ce fut l'une des belles surprises de cet automne romanesque. Au nez et à la barbe de quelques vieux routiers et autres jeunes gens chics élevés sous le harnais des plus grandes maisons parisiennes, un primo-romancier de 23 ans, Oscar Coop-Phane, concourant sous la bannière des bordelaises éditions Finitude, est venu chaparder gaiement le prestigieux prix de Flore. Tout le monde s'en est trouvé fort aise tant la bonne mine du lauréat et l'indéniable qualité de son livre, Zénith-Hôtel, ont ravi médias et lecteurs. Ils fournissent la plus appréciable "rampe de lancement" à son déjà deuxième roman, Demain Berlin, >où Coop-Phane troque les hardes sous influences Bove et Dabit de son coup d'essai pour le récit générationnel, somme toute joliment classique.

Ils sont trois. Tobias, Armand et Franz. Un peu allemands, un peu français, un peu tout, un peu rien. Ils ont derrière eux vingt ans qui pèsent parfois autant qu'un siècle et vivent leur vie comme si elle ne devait être que le brouillon d'une autre à venir. Il y a pour eux des nuits blanches et des jours blafards, la dope comme une résolution possible, le sexe comme pis-aller, et ni rêve ni ambition autres qu'un ressassement morose et sensuel. C'est à Berlin, où finit par les déposer leur dérive spleenétique, que les trois compères vont se rencontrer et trouver plus ou moins une ébauche d'explication à leurs vagabondages. Berlin, qui dès lors occupe joliment l'avant-scène du roman, corps d'une ville rayonnante de contradictions et d'intensité où "il y a quelque chose de neuf qui vous effraie".

Avec cette chronique des années de poudre et de techno, Oscar Coop-Phane a-t-il cédé à la maladie infantile des apprentis romanciers : le "syndrome Moins que zéro » ? Le penser serait faire peu de cas de ce qui d'ores et déjà l'intronise parmi les premiers de la classe de notre paysage littéraire : le style, dont suinte à chaque ligne cette fiction piégée. S'il paraît avoir abandonné le climat "bovien" de son premier roman, il en a conservé la belle sécheresse de ton, une profonde humanité qui ne s'embarrasse pas de mots. C'est une forme notable de politesse.

03.11 2014

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