Ecriture

Quatre exemples de résidences d'auteurs en bibliothèques

Claudine Galea, grand Prix de littérature dramatique jeunesse 2019 pour Noircisse, offre une lecture à voix haute lors de sa résidence. - Photo © Pascal Levy/Panthéon-Sorbonne

Quatre exemples de résidences d'auteurs en bibliothèques

De Seine-Saint-Denis à Montréal, quatre auteurs partagent leur expériences de résidences en bibliothèque.

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Par Fanny Guyomard,
Créé le 20.12.2021 à 09h52

Claudine Galea : Réunir la Sorbonne et des jeunes de Bobigny

En 2018, coup de foudre pour la bibliothèque de la Sorbonne. Alors, quand elle a voulu écrire un livre (sur le langage amoureux) avec des personnages de bibliothécaires, et avoir de quoi lire sous la main, Claudine Galea a postulé pour une résidence à la BIS (Bibliothèque interuniversitaire de la Sorbonne). Si le Covid ne s'en était pas mêlé, elle aurait interviewé des étudiants et chercheurs. « La lecture est un rapport secret au livre. Alors qu'est-ce que la lecture dans un lieu public comme une bibliothèque ? », se demande-t-elle. La metteuse en scène et autrice (Corps plein d'un rêve, Prix des Lycéens Île-de-France 2011 ; Au Bois ; Je reviens de loin parus chez Espace 34) a tout de même réussi à monter avec une classe de lycéens Balbyniens (Seine-Saint-Denis) une pièce de théâtre qu'ils ont jouée dans la prestigieuse bibliothèque. « Des élèves de Bobigny qui viennent à la Sorbonne... Ils étaient curieux, enthousiastes, posaient des questions magnifiques ! » Dans une bibliothèque, on apprend en lisant, mais aussi en rencontrant les gens.

Eric Sarner est poète.- Photo ERIC SARNER

Éric Sarner : Créer sa résidence de poésie à Paris

C'est lui qui est allé frapper à la porte de la bibliothèque Marguerite Audoux, à Paris (3e), pour lui proposer de monter une résidence. Je connaissais sa réputation : l'un des fonds de poésie les plus riches de la région parisienne , sourit l'auteur de Sugar et autres poèmes (Gallimard, 2021) ou de Ballade de Frankie (Le Castor astral, 2011). Également séduit par le fonds sur le judaïsme, il proposera une soirée yiddish.

Son CV a achevé de convaincre les bibliothécaires : ancien directeur de centre culturel, voyageur et réalisateur de documentaires (sur la Route 66, Istanbul, Alexandrie ou encore les Philippines)... Ce qui lui donne un beau carnet d'adresses, illustré le temps d'une soirée avec le contrebassiste Riccardo Del Fra. Celui-ci a, un temps, jazzé avec Chet Baker. Cette fois, il a joué avec la voix du poète.

Mais les restrictions sanitaires ont chamboulé ces dix mois de résidence et le projet d'écriture sur André Laude, un poète qui fréquentait le quartier, mort en 1995. Je voulais me renseigner sur sa vie auprès des usagers que je devais rencontrer , regrette l'auteur, qui a changé de projet : écrire de la prose poétique sur l'artiste cubaine Anna Mendieta. Le travail du poète ne doit pas forcément être en lien avec le quartier où il se trouve !

Chloé Wary : Raconter les mutations de Villetaneuse (Seine-Saint-Denis)

Sa BD raconte l'histoire d'amis d'enfance, la vingtaine, qui voient leur ville du Grand Paris changer de visage. Des amis partent, aussi. C'est l'histoire d'un deuil, du passage à la vie adulte. Deux ans que Chloé Wary, 26 ans, travaille dessus, mais ne trouve pas le temps. Et puis il y a quelques mois, Villetaneuse (Seine-Saint-Denis) lui a proposé une résidence de dix mois pour avancer sur ce livre qui raconte une mutation urbaine. La médiathèque doit justement ouvrir dans de nouveaux locaux. Ce n'est pas facile pour les équipes et le public de changer d'équipement. Donc la résidence met en écho cette mutation avec un travail artistique , explicite Florence Schreiber, responsable des partenariats à la Lecture publique du réseau de Plaine Commune. L'autrice de Beethov sur Seine (2021, Steinkis), Saison des Roses (2019, FLBLB) ou de Conduite interdite (2017), va alterner moments d'écriture et rencontres avec les jeunes et les personnes âgées. J'ai envie qu'on se balade en ville, qu'on prenne des photos et dessine dessus , se projetait l'artiste juste avant sa résidence. Et l'idéal : publier l'œuvre au printemps, à l'inauguration de la médiathèque.

Karine Légeron a notamment écrit Cassures et Nos vies de plume.- Photo RODOLPHE LASNES

Karine Légeron : S'ancrer dans un quartier de Montréal

Je suis venue m'installer dans ce quartier pour les mauvaises raisons. Cette phrase, qui deviendra sans doute l'incipit de son roman, est née d'une de ses flâneries dans Montréal, alors qu'elle faisait des repérages pour les ateliers qu'elle allait donner au cours de sa résidence. Karine Légeron, autrice de Nos vies de plume (Leméac, 2019) et de Cassures (Sémaphore, 2015), a travaillé six mois avec la bibliothèque d'Ahuntsic, à Montréal, pour écrire et animer, entre autres, des balades littéraires. Son projet : inciter les habitants à sortir de chez eux après les confinements, redécouvrir leur quartier et partager leurs croquis, photos ou textes sur un blog. Cette résidence me permet de découvrir d'autres gens, d'entrer par exemple en contact avec des réfugiées syriennes que la bibliothèque est allée chercher. Ça me nourrit beaucoup en tant qu'écrivaine, et c'est gratifiant, pour elles comme pour moi, de publier leur texte sur le blog. L'écrivain s'enrichit des habitants, et réciproquement.

 

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